Tout comme la réception judiciaire, la réception tacite s’inscrit comme palliatif à l’absence de réception expresse en matière de droit de la construction. Elle peut également être assortie de réserves. Aux assureurs en garantie décennale d’en tenir compte.
La Cour de cassation poursuit son effort inlassable de protection des maîtres d’ouvrage. En dernier lieu, un arrêt inédit de la 3e chambre civile du 20 mars 2025 (n°23-20.475) vient entériner une évolution jurisprudentielle récente confirmant le principe d’une présomption de réception tacite. Aux termes de l’arrêt commenté, il est en effet rappelé que « le paiement de l’intégralité des travaux et la prise de possession par le maître de l’ouvrage valent présomption de réception tacite… » et que cette réception tacite « n’est pas subordonnée à l’achèvement de l’ouvrage, mais peut être assortie de réserves ».
Les faits de l’espèce
Les faits sont classiques. En l’espèce, une SCI, maître d’ouvrage, entend procéder à des travaux de rénovation de deux biens immobiliers pour y créer six logements. Pour ce faire, elle confie, fin 2016, les travaux à diverses sociétés, lesquelles ont en commun le même gérant. Les travaux sont suspendus courant 2017 et le chantier laissé à l’abandon. Une expertise judiciaire est ordonnée à la demande de la SCI à la suite de malfaçons et de divers désordres.
Sur la base du rapport déposé en juin 2019, la SCI assigne les constructeurs et leurs assureurs sur le fondement de la responsabilité décennale. Elle sollicite alors de voir prononcer la réception judiciaire, à défaut la réception tacite des travaux, à la date du 31 juillet 2017. Ces deux demandes sont rejetées par la cour d’appel de Bourges. S‘agissant de la réception judiciaire, le juge estime que « l’ampleur de ces seules malfaçons et non-façons […] fait obstacle à ce que les appartements et la mission litigieux puissent être considérés comme habitables et, partant, en état d’être reçus ».