Le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) dresse le bilan de son activité après vingt ans d’existence et profite de cet anniversaire pour mieux se faire connaître.
Le Fiva célèbre son vingtième anniversaire et procède à une rétrospective de deux décennies d'activité indemnitaire. Au cours de cette période, plus de 110 000 victimes ont sollicité le Fiva en vue d'obtenir une réparation, représentant un montant total d'indemnisation de 7 Md€. C’est en moyenne plus de 65 000€ d’indemnisation versée par dossier.
Le Fiva prend en charge les victimes, qu'elles aient été exposées à l'amiante dans un contexte professionnel ou environnemental, qu'elles soient salariées ou non, et qu'elles bénéficient ou non d'une protection sociale contre les risques de maladies professionnelles. Cependant, il est essentiel de fournir des preuves attestant de l'exposition à l'amiante et des préjudices subis sur la santé.
Une facture à la hausse pour la Sécurité sociale
Loin d'appartenir au passé, ce sinistre sériel aux conséquences majeures demeure un sujet d’actualité, notamment dans le cadre du PLFSS 2024. Le nombre de nouvelles victimes enregistrées chaque année, 2 700 en 2022, et les sommes considérables engagées, 264 M€ la même année, en font un sujet chaud sur le plan financier. D’autant plus que le Fiva évalue ses décaissements 2023 et 2024 à 600 M€ !
La branche AT-MP de la Sécurité sociale finance en grande partie le fonds, contribuant à hauteur de 83 % l'année dernière par exemple. « Pendant plusieurs années, cette contribution est restée stable à 220 M€, mais cette année, elle atteindra 335 M€ dans le PLFSS 2024. En complément de ce financement, nous avons bénéficié, l’année dernière, d'une allocation de 8 M€ prélevée au budget de l'État, ainsi que de recettes provenant des recours engagés pour faute inexcusable de l’employeur, ayant généré 35 M€ », explique Jean-Luc Izard, directeur du Fiva.
La hausse des dépenses trouve son origine dans deux facteurs majeurs. Tout d'abord, en janvier dernier, un revirement dans la jurisprudence de la Cour de cassation a altéré la nature de la rente AT-MP versée par la Sécurité sociale. « Conformément à cette récente décision, la rente est dorénavant considérée comme étant de nature purement économique, précise Daniel Jubenot, directeur adjoint du Fiva. Auparavant, elle était reconnue comme ayant une nature mixte, à la fois économique et extrapatrimoniale. » Par conséquent, le Fiva doit désormais indemniser l’incapacité fonctionnelle sans plus pouvoir déduire son montant de l'indemnisation déjà versée.
La seconde cause de cette hausse réside dans la récente révision du barème d'indemnisation du Fiva, décidée par le conseil d’administration du fonds en juin dernier. « Ces changements prendront toute leur ampleur l'année prochaine. La décision de la Cour de cassation entraînera des implications financières estimées entre 40 et 50 M€, tout comme la révision du barème, qui se situe dans la même fourchette », affirme Jean-Luc Izard.
Digitaliser le Fiva pour mieux le faire connaître
Le Fiva met en relief son engagement en matière de sensibilisation des victimes et des moyens à leur disposition pour faire valoir leur droit. À travers le lancement d’une nouvelle fonctionnalité baptisée « Fiva demandeur », le fonds aspire à mieux informer et simplifier les démarches désormais dématérialisées. D'après les données du Programme national de suivi du mésothéliome (PNSM), seules 65 % des personnes touchées par le mésothéliome, un cancer incurable étroitement lié à l'amiante, ont fait une démarche pour solliciter une indemnisation auprès du fonds depuis 2005. Par ailleurs, le Fiva prévoit des ajustements réglementaires à venir (notamment sur le volet RGPD) pour lui permettre d'entrer directement en contact avec les victimes de l'amiante qui auraient été identifiées par les administrations ou organismes publics.
Aux origines du fonds et de l’exclusion du risque amiante des polices
Mis en place en 2001, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) s'appuie sur le principe de solidarité nationale. Cette démarche fut initiée dans le but de résoudre deux enjeux majeurs : d'une part, les obstacles rencontrés par les victimes dans leur quête de réparation, et d'autre part, les conséquences financières considérables auxquelles étaient confrontées les entreprises en raison de condamnations judiciaires. Cette initiative a été prise bien avant que le Conseil d'État ne reconnaisse pour la première fois, en 2004, la responsabilité de l'État dans cette affaire. De leur côté, les assureurs ont commencé à exclure délibérément le risque lié à l'amiante de leurs contrats dès les années 1990, en raison de difficultés à mesurer leur niveau d’exposition.