Dans le cadre d'application de la norme IFRS 17, assureurs et réassureurs sont contraints de refonder leur production comptable. L'occasion de repenser les processus de production et de contrôle.
Avec l’entrée en vigueur au 1er janvier 2023 d’IFRS 17, dont les modalités ont été définitivement arrêtées en ce qui concerne notamment l’établissement de l’exercice comparatif de 2022, les assureurs et réassureurs doivent désormais faire face à de nouvelles problématiques. Celles-ci couvrent différents aspects liés au métier, à la méthodologie et à l'opérationnel qui, malgré les exercices préparatoires, n’ont pas pu complètement remplacer l’expérience des conditions réelles de production comptable, ni celles des enjeux d’organisation et de pilotage.
Pour les entreprises concernées, si le temps est désormais venu de produire la comptabilité selon le nouveau cadre réglementaire, il convient aussi de s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue et d’appropriation plus générale des données comptables produites.
Des problématiques d’ordre métier, méthodologique et opérationnelle
La granularité des calculs, qui sont réalisés au niveau du groupe de contrats, c’est-à-dire du regroupement des contrats par portefeuille (risque et gestion similaires), ventilés par cohorte annuelle (pour les assureurs vie non européens et les assureurs non-vie) et par niveau de profitabilité (contrats onéreux ou profitables), soulève encore plusieurs problématiques.
- L'enjeu « métier » : il existe un risque d’écart entre la représentation comptable et la manière dont est gérée l’activité d’assurance (par exemple une plus grande segmentation des contrats alors que l’activité d’assurance est basée sur la mutualisation des risques) ;
- l'enjeu « méthodologique » : l’élaboration par chaque assureur de ses propres modèles d’agrégation et/ou de ses clés de répartition des frais aux contrats peut induire une difficulté dans la comparabilité des résultats entre assureurs (alors même que l’un des principaux enjeux de la réforme est de promouvoir une vision économique qui favorise la comparabilité des résultats entre assureurs mais également avec des acteurs d’autres industries) ;
- l'enjeu « opérationnel » : l’allocation de données calculées à un niveau agrégé, par exemple au niveau de l’entreprise, à un niveau de granularité conforme à ce qui est requis par IFRS 17, génère une charge de travail accrue pour l’élaboration et la maintenance des modèles et une augmentation des temps de traitement informatique pour mener à bien les calculs et les projections nécessaires à la comptabilité et à son reporting.
La prise en compte des frais attribuables et frais non attribuables, ainsi que des frais d’acquisition, dans l’évaluation des groupes des contrats d’assurance soulève aussi d’autres problématiques.
- l'enjeu « métier » : la ventilation des frais entre les groupes de contrat a un impact direct sur l’évaluation de leurs flux de trésorerie actualisés, et donc sur leur profitabilité ;
- l'enjeu « méthodologique » : l’élaboration par chaque assureur de clés de répartition des frais, ainsi que du test de dépréciation de l’actif représentant les frais d’acquisition, se doit d’être stable, ou à tout le moins maîtrisable dans le temps ;
- l'enjeu « opérationnel » : le niveau d’automatisation des ventilations de frais a un impact direct sur le temps de production des comptes. Une attention toute particulière doit donc être apportée au choix des règles à appliquer et à la mise en œuvre des outils à même de réaliser les calculs dans des délais compatibles avec les délais de clôture.
L’ajustement pour risque, qui correspond dans l’approche IFRS 17 à la réserve de prudence dont l’assureur se dote pour faire face à l’incertitude des flux futurs de trésorerie relative aux risques non financiers (par exemple, des sinistres plus fréquents que ceux modélisés) est un poste, déjà présent dans le cadre prudentiel Solvabilité II, qui pourrait s’avérer difficile à évaluer et à justifier en cas de divergence avec le cadre retenu en comptabilité avec IFRS 17.