La prescription biennale de l’article L.114-1 du Code des assurances a mauvaise presse devant la Cour de cassation qui, de façon plus ou moins subtile, invite régulièrement le législateur à modifier ce texte dont elle estime la durée de prescription trop brève pour le consommateur d’assurance. Mais il arrive parfois, comme c’est le cas pour l’arrêt du 5 mars 2020 (n° 18-20383), dans une affaire de garantie catastrophe naturelle, que la juridiction suprême opère un revirement jurisprudentiel.
Avocat à la Cour, CHOISEZ & ASSOCIES
En matière de prescription biennale, c’est peu de dire que le moyen doit être utilisé à bon escient par les assureurs, au point qu’on en soit venu à parler de « jurisprudence de provocation » (le mot est du professeur Pélissier), comme ce fut le cas avec le célébrissime arrêt Desmares du 21 juillet 1982 (n° 81-12850), dont le juridisme précipitera l’avènement de la loi du 5 juillet 1985, dite loi Badinter.
Petit rappel des règles autorisant à faire jouer la prescription biennale, qui vont subir sur plusieurs années un véritable chemin de croix judiciaire, détaillé par Romain Schulz (in RGDA 2017, pages n° 449 et suivantes). D’abord, la Cour de cassation va poser que la sanction de non-respect de l’obligation de l’article R.112-1 est l’inopposabilité de la prescription biennale de l’assureur à l’assuré (Civ. 2e du 2 juin 2005, n° 03-11.871).
Puis, la Cour de cassation posera que l’obligation de « rappeler les dispositions » n’est pas un simple renvoi aux textes mais bien plus une obligation de citation des dispositions elles-mêmes (Civ. 3e du 28 avril 2011, n° 10-16.269).
Enfin, la Cour de cassation ira au-delà même du texte de la loi, en posant que les polices d’assurance devaient non seulement reproduire les dispositions du Code des assurances en matière de prescription, mais également les causes d’interruption de droit commun prévues par le Code civil, au motif que l’article L.114-2 du Code des assurances en fait accessoirement mention (Civ. 2e du 18 avril 2013, n° 12-19.519).