Docteur en droit, avocat à la cour
En ces temps où les gilets jaunes font l’actualité, l’arrêt de la chambre mixte de la Cour de cassation du 30 novembre 2018 (n° 17-16.047) prend un relief tout particulier.
Tout d’abord, il convient de rappeler que le renvoi devant la chambre mixte de la Cour de cassation est ordonné lorsqu’une affaire pose une question relevant de l’attribution de plusieurs chambres ou si la question est susceptible de recevoir, devant les chambres, des solutions divergentes. C’est dire toute l’importance de l’arrêt du 30 novembre 2018.
Quels sont les faits et la procédure ?
Les faits sont simples et non contestés. Lors d’un rassemblement de près de 200 producteurs laitiers de la Mayenne, un dirigeant de la FDSEA, syndicat d’agriculteurs, appelle publiquement ses adhérents à charger des pneus dans leurs tracteurs et à les déposer devant l’entrée de la société laitière Lactalis, puis à se rendre à un rond-point de façon à définir la stratégie du mouvement.
Quelques heures plus tard, les pneus ont été incendiés en présence du même dirigeant syndical, occasionnant des dégâts matériels aux barrières et au portail d’entrée de Lactalis.
Assignés devant le tribunal de grande instance de Laval par Lactalis, le dirigeant syndical et son syndicat, la FRSEA, sont condamnés in solidum en première instance, au paiement de dommages et intérêts.
Le syndicat et son représentant font appel de ce jugement devant la cour d’Angers. Par un arrêt du 17 janvier 2017, la cour d’appel d’Angers a débouté Lactalis de sa demande formée contre le représentant syndical en considérant qu’il n’avait pas commis de faute détachable de l’exercice de son mandat syndical ; en revanche, elle a condamné son syndicat à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, en retenant qu’il avait donné des instructions aux agriculteurs ; et ces instructions, dit la cour d’appel, doivent s’analyser comme une...