La décision rendue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt du 29 mars 2018 (pourvoi n° 17-14.087) est un classique du genre. Il s’agit de préciser les conditions dans lesquelles la faute commise par un piéton peut être retenue pour exonérer l’automobiliste qui l’a heurté et ainsi priver ce piéton de toute indemnisation.
DOCTEUR EN DROIT, AVOCAT À LA COUR, CABINET CAMACHO & MAGERAND
Nous savons que la loi de 1985 a voulu que les victimes non conductrices bénéficient d’une protection la plus large possible. Ainsi, seulement deux situations supprimeront le droit à réparation intégrale des piétons : il s’agit, d’une part, de la faute inexcusable, cause exclusive de l’accident et, d’autre part, de la recherche volontaire du dommage.
Quels sont les faits de cette affaire ?
Le 26 janvier 2008, vers 20h50, Monsieur M…, après avoir quitté volontairement le service des urgences de l’hôpital de Carcassonne dans lequel il avait été admis pour un état d’imprégnation alcoolique, part à pied sur la rocade sud de Carcassonne. Il est percuté par le véhicule de M. Z... et décède sur le coup.
L’enquête établit que Monsieur M. déambulait de nuit, ivre (1,87 gramme d’alcool), positif au cannabis, et vêtu de sombre au milieu d’une chaussée à grande circulation et sans éclairage ; en outre, il avait refusé de se ranger sur le bord de la chaussée malgré un signal donné en ce sens, juste avant l’accident, par un autre automobiliste.
Les ayants droit du piéton victime ayant assigné M. Z et son assureur, les tribunaux du fond les déboutèrent de leur action, un pourvoi contre l’arrêt de Montpellier fut donc engagé devant notre cour suprême.
L’arrêt de la Cour de cassation du 29 mars 2018
Les ayants droit soutenaient deux arguments. D’une part, ils estimaient que l’exceptionnelle gravité de la faute de la victime n’était pas constituée en l’espèce et que, d’autre part, les tribunaux du fond auraient dû constater l’existence d’un dispositif de sécurité que la victime aurait volontairement franchi pour accéder à la route. Confrontés aux faits, ces deux « arguments » paraissent particulièrement faibles ! Le pourvoi est donc rejeté… et c’est raison !