Le calcul des préjudices des proches d’une victime décédée est, en général, relativement simple. Il suffit de respecter une méthodologie issue de la pratique et confirmée par la jurisprudence. Par arrêt du 7 février 2019 de la 2 chambre civile, la Cour de cassation (pourvoi n° 18-13354) vient opportunément rappeler quelques-unes des règles à décliner en ce domaine.
Docteur en droit, avocat à la cour
Quels sont les faits ?
Un homme âgé de 63 ans décède d’un cancer consécutif à une exposition professionnelle à l’amiante, diagnostiqué en février 2012. Sa veuve et ses deux filles demandent au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) l’indemnisation de leur préjudice économique.
Les parties au procès étaient d’accord sur le revenu de référence de la famille pour un montant de 60 708 €, somme à partir de laquelle les calculs des préjudices des ayants droit doivent s’opérer. En revanche, les parties étaient opposées sur la notion basique de répartition de ce revenu entre le conjoint, les enfants et… la personne décédée. En effet, il faut admettre que toute la famille vivait de ce revenu, ce qui suppose qu’il doit être réparti entre tous les membres de la famille avant le décès. Plus concrètement, le mari et père qui est décédé consommait nécessairement une part des revenus.
Les décisions judiciaires
La cour d’appel de Paris, dans son arrêt du 22 janvier 2018, a estimé que le revenu annuel de la personne décédée devait être réparti, à raison de 60 % pour sa veuve et de 20 % pour chacune de ses deux filles. Raisonner de cette façon conduit à ignorer que la personne décédée consommait elle aussi une part du revenu familial.
La cassation était inévitable et c’est ce qu’a décidé la Cour suprême dans son arrêt du 7 février 2019 :
« Vu le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;
Attendu qu'en cas de décès de la victime directe, le préjudice patrimonial subi par l'ensemble de la famille proche du défunt doit être évalué en prenant en compte comme élément de référence le revenu annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné le décès de la victime directe en tenant compte de la part de consommation personnelle de celle-ci, et des revenus que continue à percevoir le conjoint, le partenaire d'un pacte civil de solidarité ou le concubin survivant ;