Un juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée unilatéralement par une partie.
AVOCATE, CABINET CAMACHO & MAGERAND
Une société (EURL) a déposé plainte pour le vol de l’un de ses véhicules, lequel a par la suite été retrouvé incendié. L’assureur du véhicule a refusé la mobilisation de ses garanties après avoir fait procéder, par un expert mandaté par lui, à un examen technique du véhicule.
La société victime du vol a donc, de son côté, fait diligenter une expertise amiable contradictoire, à la suite de laquelle l’assureur a maintenu son refus de garantie.
C’est dans ces conditions que l’EURL a donc assigné l’assureur du véhicule volé aux fins d’obtenir sa condamnation à prendre en charge le sinistre.
Par un arrêt rendu le 2 décembre 2015, la cour d’appel de Riom (Puy-de-Dôme) a débouté l’EURL de l’ensemble de ses demandes en jugeant que les conditions d’exclusion de la garantie, stipulées à l’article 6, étaient réunies dès lors que « l’expert mandaté par l’assureur » avait « constaté, lors de son examen du véhicule, la présence d’une clé dans l’antivol » laissant à penser que les clés étaient présentes lorsque le véhicule a été dérobé.
Cet arrêt est censuré par la 2e chambre civile de la Cour de cassation, au visa des dispositions des articles 16 du Code de procédure civile et 6§1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, laquelle rappelle qu’un juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties lorsqu’elle n’est corroborée par aucun autre élément de preuve.
Ainsi, si un juge peut se servir d'un rapport d'expertise réalisé à la demande d'une partie comme d'un indice pour apprécier l’existence ou non d’un dommage et le montant de l'évaluation qu'il entend allouer à la victime, il ne peut exclusivement se fonder sur cet élément de preuve pour fonder sa décision (chambre mixte, 28 septembre 2012, pourvoi n° 11-18.710 ; Civ. 2e, 5 mars 2015, pourvoi n° 14-10.861).