Dans un arrêt du 4 mars 2021, la Cour de cassation se prononce en faveur du droit qu’a la victime exerçant une action directe contre l’assureur de faire valoir toutes les exceptions de garantie normalement réservées au seul assuré, et ce au nom de l’autonomie de l’action directe.
Avocat associé, cabinet Choisez
Le droit des assurances possède ceci de fascinant que certains fondements juridiques n’en finissent pas de révéler leurs subtilités, alors même que l’on pensait avoir fait le tour de la matière.
Tel est précisément le cas pour l’action directe de l’article L.124-3 du Code des assurances qui confirme toujours et plus encore son autonomie, en reconnaissant à la victime qui l’exerce de ne pas se contenter de recevoir le bénéfice d’un contrat conclu par son auteur responsable – et donc souscripteur de la police – mais lui permettant, aux termes d’un arrêt du 4 mars 2021 (Civ. 3e – n° 19-23.033), de débattre de la validité et de l’opposabilité d’une restriction de la garantie préjudiciable à ses intérêts, en l’espèce une clause d’exclusion.
Ce principe d’action directe, légalisé désormais, est issu d’un arrêt fondateur du droit des assurances du 14 juin 1926 (cf. l’ouvrage indispensable des Grands arrêts du droit des assurances, Sirey 1978, p. 212, de Cl-J Berr et H. Groutel) permettant de fait à la victime de posséder un privilège sur l’indemnité due par l’assureur de responsabilité, sans avoir à subir les affres – l’hypothèse ne fut pas rare – de devoir perdre tout droit à indemnisation si l’auteur et assuré partait en procédure collective, rendant dès lors l’assurance de responsabilité sans intérêt aucun.
Sans reprendre tout l’historique de l’action directe (voir le Traité de droit des assurances de B. Beignier et S. Ben Hadj Yahia, éditions LGDJ 2018, notamment n° 753 et suivants), la jurisprudence n’a eu de cesse d’en montrer les subtilités, qui s’articulent autour de l’idée que « l’action directe du tiers lésé contre l’assureur de responsabilité (est) une action autonome qui trouve son fondement dans le droit de ce tiers à réparation de son préjudice » (Civ. 3e du 15 décembre 2010, n° 09-68.894).