Alors qu’elle tente, depuis plusieurs années, d’aligner les points de départ du délai d’action en garantie des vices cachés, la Cour de cassation a rendu, le 28 mai dernier, un arrêt permettant à des demandes prescrites en droit de la vente de continuer à prospérer. La Haute juridiction deviendrait-elle schizophrène ?
La Chancellerie poursuit inlassablement son effort de désengorgement des tribunaux au profit de règlements amiables des conflits au point où l’on peut parler littéralement d’une « politique nationale de l’amiable » (voir en ce sens l’éclairant article du Professeur Natalie Fricéro, L’audience de règlement amiable : un nouveau mode amiable ?, Dalloz actualités éd. 6 juin 2025). Toutefois, la politique judiciaire de la Cour de cassation prend parfois le chemin inverse, allant jusqu’à s’apparenter à un véritable tonneau des Danaïdes tant elle facilite certains recours qu’on aurait pu croire prescrits.
Preuve en dernier lieu de ce constat, un très intéressant arrêt de la 3e chambre civile du 28 mai 2025 (n°23-18.781) publié au Bulletin, ce qui signe son importance, rendu en matière de point de départ de l’action en garantie des vices cachés, exercée par un constructeur et son assureur, contre un fournisseur et son assureur. Aux termes d’une motivation rigoureuse et pourtant pragmatique, la 3e chambre civile fixe le point de départ de ce délai à la date de l’assignation en responsabilité, délivrée au constructeur, et, à défaut, à compter de l’exécution de son obligation à réparation.
Un assureur à la double casquette DO/RCD
Les faits sont assez classiques : dans le cadre d’une opération de réhabilitation, un maître d’ouvrage confie les travaux à un certain nombre de constructeurs. Une assurance dommages-ouvrage est également souscrite auprès d’une compagnie qui aura une double casquette puisqu’elle assurera également la RCD du constructeur titulaire du lot bardage.