Dans une affaire de suspicion de fraude lors de la déclaration d’un vol de véhicule, la Cour de cassation a jugé que l’expertise devait être contradictoire, et que les conclusions rendues par le seul expert missionné par l’assureur n’étaient donc pas suffisamment probantes.
Avocat à la Cour, cabinet Camacho & Magerand
Un arrêt de la Cour de cassation sur le domaine de l’expertise en automobile est suffisamment rare pour qu’il justifie une attention particulière et quelques commentaires.
A la suite d’un vol du véhicule de son assuré, une déclaration de sinistre est faite à l’assureur SwissLife qui refuse sa garantie et donne mission à un expert en automobile d’examiner le véhicule retrouvé incendié. Procédant à l’examen du véhicule, l’expert « découvre » la présence d’une clef dans l’antivol ce qui rend évidemment suspecte la réalité du vol du véhicule.
L’expert prend des photos, lesquelles sont datées lors de son examen, et dépose son rapport. L’assureur ayant confirmé son exclusion de garantie, son assuré l’assigne en exécution de son contrat.
Le 2 décembre 2015, la cour d’appel de Riom (Puy-de-Dôme) estime que les conditions d’exclusion de la garantie de l’assureur sont remplies ; l’assuré est débouté de son action.
C’est cet arrêt de Riom qui est cassé par la Cour de cassation le 2 mars 2017 ; il l’est au motif suivant : « La cour d’appel s’est fondée exclusivement sur une expertise judiciaire réalisée unilatéralement à la demande de l’une des parties et qui n’est pas corroborée par d’autres éléments de preuve. »
Limite de la règle
Nous sommes, avec cet arrêt, à la limite de la bonne interprétation de la règle. En effet, si l’on peut admettre « l’erreur » de l’expert de ne pas avoir, lors de ses examens, convoqué et échangé avec l’assuré sur les raisons de la présence de la clef dans le véhicule, il est aussi difficile de considérer que la démarche de l’expert ne soit pas corroborée par d’autres éléments de preuve. Ainsi, le fait que l’expert fasse des constatations, puis photographie et date ses photos au jour de son examen de la clef dans le barillet – ce qui rend le vol du véhicule très illusoire – devrait pouvoir constituer cette preuve ; si on ajoute à cela la considération que l’expert en automobile exerce un métier réglementé, il n’aurait pas été si choquant que le cumul d’indices et de circonstances particulières aient pu constituer cette preuve suffisante pour décliner la garantie de l’assureur. La Cour de cassation en a décidé autrement ; dont acte.