Dans cet arrêt, la Cour de cassation applique le régime de responsabilité de la garantie décennale au fournisseur, en dehors de l’hypothèse prévue à l’article 1792-4 du Code civil.
AVOCATE, CABINET CAMACHO & MAGERAND
L’arrêt commenté vient illustrer une fois de plus l’évolution de la jurisprudence vers un élargissement du champ d’application du régime de la responsabilité civile décennale.
Les faits rapportés concernaient une opération de construction d’un bâtiment à usage industriel. Le maître d’ouvrage s’étant plaint de divers défauts affectant le béton utilisé pour la réalisation de la dalle a, après expertise, assigné le fournisseur du béton.
Ce dernier a appelé, à son tour, en garantie, l’entreprise de maçonnerie. Les juges du fond ont prononcé la condamnation du fournisseur à prendre en charge les travaux de reprise des désordres, sur le fondement de l’article 1792 du Code civil.
L’arrêt est confirmé par la Haute juridiction aux motifs que le fournisseur, « dont le préposé, présent sur les lieux lors du coulage des deux premières trames, avait donné au poseur des instructions techniques précises, notamment quant à l'inutilité de joints de fractionnement complémentaires, auxquelles le maçon, qui ne connaissait pas les caractéristiques du matériau sophistiqué fourni, s'était conformé, avait ainsi participé activement à la construction dont elle avait assumé la maîtrise d'œuvre, la cour d'appel, qui a pu en déduire que la société Lafarge n'était pas seulement intervenue comme fournisseur du matériau, mais en qualité de constructeur au sens de l'article 1792 du Code civil, a légalement justifié sa décision de ce chef ».
La Cour de cassation retient, donc, que par son comportement le rôle de l’entreprise de béton ne s’est pas limité à celui d’un fournisseur. Au contraire, son comportement caractérise celui d’un constructeur dont la responsabilité est engagée au titre de la garantie décennale.