EIOPA

Règles prudentielles proportionnées pour les captives

Publié le 10 juillet 2024 à 13h00

Mehdi ElAouni    Temps de lecture 5 minutes

L’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (EIOPA) publie un avis à l’attention des autorités nationales concernant les captives de réassurance et préconise une application proportionnée de la réglementation prudentielle.

Dans son avis émis le 2 juillet, l’EIOPA réaffirme ses attentes concernant une supervision convergente et de qualité des structures captives au sein de l’Union européenne. « La dépendance à l’égard d’approches spécifiques et la possibilité d’une réglementation et d’une surveillance plus strictes de la part de l’autorité de contrôle nationale sont des facteurs susceptibles d’avoir des conséquences négatives sur la qualité de l’assurance », écrit l’EIOPA dans son avis. « Initialement, c’est une consultation lancée par l’EIOPA en octobre 2023 qui a abouti à cet avis visant à harmoniser le système de gouvernance dans l’UE. L’objectif est d’éviter que chaque pays, devant se conformer à Solvabilité II, n’applique ses propres règles. La modification récente de la réglementation de certains États membres concernant les captives et la volonté de ces pays d’attirer ce type de véhicules a pu révéler une disparité de pratiques, nécessitant une harmonisation des règles », résume Eleonora Sorribes, avocate associée chez LPA-CGR.

Cadre prudentiel

L’EIOPA rappelle ainsi l’importance du principe de proportionnalité appliqué aux captives et inscrit dans Solvabilité II (et sa révision). « La Commission européenne a proposé auparavant de considérer les captives en Europe comme des assureurs "Small and Complex" car elles sont moins systémiques que les opérateurs traditionnels. Et à ce titre, cela permet d’appliquer avec proportionnalité les règles prudentielles soumises aux assureurs, rappelle Brigitte Bouquot, présidente de la Fédération française des captives d’entreprise. Cela confirme la volonté du superviseur d’adopter des pratiques convergentes pour instaurer un "level playing field" afin d’homogénéiser le traitement des captives en Europe et ainsi renforcer l’attractivité du territoire européen dans ce domaine. »

Liquidité

L’avis souligne le principe de prudence, exigeant la garantie de sécurité, de qualité, de liquidité et de rentabilité du portefeuille d’actifs détenus pour garantir les risques souscrits par la captive. Le gendarme européen met particulièrement l’accent sur les transactions intragroupes, notamment via le système de « cash pooling » qui est assimilée à une activité de crédit, et est autorisée entre filiales d’une même société grâce à leur lien capitalistique.

Ce système nécessite cependant l’établissement d’une convention entre la maison mère et ses filiales. « L’EIOPA juge que Solvabilité II dispose de tous les outils nécessaires pour bien évaluer les risques de liquidité des actifs des captives. Il s’agit de clarifier la qualification juridique : une convention de trésorerie ou plutôt de prêts où l’emprunteur pourrait rembourser dans des conditions plus difficiles », souligne Brigitte Bouquot.

Gouvernance

L’EIOPA aborde aussi les aspects de gouvernance des captives, comme l’externalisation des ressources humaines. « Les captives ne recrutent généralement pas en raison des coûts élevés et de la simplicité de leur stratégie d’investissement. Elles tendent à externaliser pour des raisons financières et de compétences. Ce métier étant peu développé, il est difficile de trouver des personnes qualifiées, ce qui a conduit à l’émergence de gestionnaires de captives indépendants, souvent des courtiers. Il est nécessaire de réguler pour s’assurer que les gestionnaires externes soient compétents, indépendants et éviter tout risque de conflits d’intérêts », observe Eleonora Sorribes. Contrairement au modèle luxembourgeois des captives qui fait appel à un « captive manager », en France, c’est un membre de la direction du groupe d’origine qui prend en charge la gestion de la captive. Un modèle encouragé par le superviseur européen qui appelle à ce que la direction de la captive inclut au moins un représentant du groupe industriel ou commercial auquel elle appartient, afin d’aligner les intérêts.

Zoom sur

La fédération française des captives d’entreprise (FFCE)

Créée en novembre 2023, l’association professionnelle représente les filiales captives d’assurance et de réassurance des entreprises domiciliées en France. Sa fondation a suivi la publication du décret sur les règles de comptabilisation de la provision pour résilience des captives de réassurance. Présidée par Brigitte Bouquot, la FFCE a pour mission de soutenir le développement des captives françaises en collaboration avec les acteurs du marché (courtiers, assureurs, réassureurs, actuaires, avocats, conseils, experts, etc.). Aux côtés de l’Amrae, la FFCE représente directement les entreprises industrielles et commerciales dans le débat public concernant leurs risques et assurances. Pour rappel, parmi les 120 captives d’entreprises françaises, 15 sont agréées et domiciliées en France.

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