Bilan des IP

Bien qu’au vert en 2024, le CTIP voit rouge

Publié le 2 juillet 2025 à 9h25

Sarah Noufi    Temps de lecture 6 minutes

Le CTIP a présenté le bilan 2024 de l’activité de ses membres et c’est un bon cru. Pour autant, Jacques Creyssel (Medef) et Alain Gautron (CGT-FO), respectivement président et vice-président du Centre technique des institutions de prévoyance, ainsi que Marie-Laure Dreyfuss, déléguée générale, ont exprimé de vives inquiétudes quant à la pérennité du modèle Ocam si des discussions ne sont pas rapidement engagées avec l’AMO, et surtout… le gouvernement, alors que vont s’engager les débats sur le PLFSS 2026.

Proposition de mesure de lutte contre les fraudes et partage de données avec l’AMO non aboutis après la censure du Conseil constitutionnel, projet gouvernemental introduisant une taxe estimée à 1 Md€ sur les contrats obligatoires pour les complémentaires… autant d’éléments qui inquiètent le CTIP. « Nous arrivons à une ligne rouge », déclare Jacques Creyssel, président du CTIP, mardi matin lors de la conférence de presse, malgré un bon bilan 2024 pour les institutions de prévoyance.

En effet, le président ainsi que la déléguée générale insistent sur l’importance de maintenir l’équilibre du résultat technique afin de continuer à assumer les engagements des IP, notamment le risque long que représentent les arrêts maladie, en forte hausse l’année dernière. Ils pointent aussi la baisse des indemnités journalières, passées de 1,8 à 1,4 smic (en vigueur depuis avril 2025), qui aura nécessairement des conséquences sur le bilan technique 2025 du CTIP. Selon la déléguée générale, cette baisse des IJ représentera environ 300 M€ de charges supplémentaires en année pleine pour ses membres.

« Il est anormal de devoir compenser cette mesure avec nos résultats financiers alors que notre volonté est d’équilibrer techniquement nos opérations », ajoute-t-elle. « La santé est notre activité principale, mais nous perdons systématiquement de l’argent dans ce domaine, avec un résultat technique déficitaire. Nous compensons cela avec notre résultat financier, mais ce n’est pas la vocation d’un assureur », insiste-t-elle.

Par ailleurs, Marie-Laure Dreyfuss rappelle qu’en 2024, les IP couvrent 14 millions de personnes en prévoyance et en santé, dont 7,7 millions de salariés et leurs familles via plus de 2 millions d’entreprises. À noter toutefois que la couverture des conjoints et ayants droit est en recul.

Le ratio moyen de solvabilité des IP est de 293% en 2024, avec un résultat net s’élevant à 735,1 M€. « Nous couvrons trois fois la marge de solvabilité requise. Et pour ce qui est du résultat en 2024, c’est tout simplement insuffisant face à la taxe que l’État prévoit dans le PLFSS 2026 », souligne Marie-Laure Dreyfuss. Les cotisations ont augmenté de 2,3% en 2024, pour atteindre un montant de 16,7 Md€, tandis que les fonds propres s’établissent à 16,2 Md€. Les prestations, quant à elles, sont en léger recul de 0,7 %, pour un total de 3,9 Md€.

Des chiffres clés à l’équilibre…

Au total, en santé, le résultat technique reste négatif en 2024, à -102,2 M€ (contre -244,2 M€ en 2023), malgré une progression des cotisations de 4,1% (7,8 Md€ en 2024 contre 7,5 Md€ en 2023). Les prestations, elles, progressent de 1,3%, atteignant 6,8 Md€.

Selon la déléguée générale, les dépenses de santé suivent une dynamique d’augmentation structurelle, portée notamment par les revalorisations salariales dans le secteur de la santé, la hausse du nombre de patients en ALD, et le vieillissement de la population. À noter que les dépenses liées au 100 % santé représentent un tiers des prestations versées par les IP. Le montant est estimé à 2,2 Md€ en 2024, dont 486,4 M€ sur le panier 100% santé sans reste à charge (+14,4% vs 2023).

« Les dépenses de santé continuent d’augmenter, et pourtant, depuis deux ans, nous ne discutons plus avec le ministère de la Santé. Finalement, nous n’avons aucune marge de manœuvre sur ce dispositif du 100 % santé », s’inquiète-t-elle. En optique, dentaire et audio, les coûts pour les IP varient entre 162 M€ pour l’audio et 1,2 Md€ pour l’optique en 2024. Le président du CTIP ajoute que le sujet des contrats responsables mérite une remise à plat : « Il faut revoir ce qui est obligatoire, ce qui peut être optionnel… Cela suppose un vrai travail avec les partenaires sociaux. Il est temps de s’y attaquer sérieusement. »

Même train-train pour la prévoyance

« Nous observons, à quelques variantes près, les mêmes tendances en prévoyance », ajoute Marie-Laure Dreyfuss. Les résultats sont restés stables en 2024, grâce à des taux d’intérêt élevés. Elle poursuit : « L’assureur est davantage engagé sur le long terme en prévoyance qu’en santé. L’arrêt de travail est un risque long, que nous essayons de gérer au mieux. » Les cotisations s’élèvent à 7,9 Md€ (+0,5% vs 2023), et les prestations à 5,8 Md€ (-1,1% vs 2023). « Notre priorité va à l’équilibre technique des résiliations et/ou des majorations le cas échéant », ajoute-t-elle.

Concernant les arrêts de travail, ils se sont stabilisés à des niveaux élevés depuis 2021. « Nous sommes arrivés à un plateau, mais nous ne comprenons pas toutes les raisons de la baisse des prestations. Il y a davantage d’arrêts courts, et moins de cas d’incapacité ou d’invalidité », déclare-t-elle. À noter tout de même que la charge des prestations arrêts de travail a baissé de 1,8 % en 2024, à 3,96 Md€ (contre 4 Md€ en 2023).

« Nous avons été les premiers surpris par ces chiffres, qui vont à l’encontre du discours dominant sur la hausse des prestations en prévoyance », s’interroge le CTIP.

Une niche qui prend de la place

La retraite supplémentaire connaît une croissance soutenue. L’encours d’épargne des IP à fin 2024 est estimé à 19,3 Md€, avec une progression des cotisations de 2,9%. Le PER obligatoire a connu un bon développement en 2024 : 8,9 Md€ d’encours (contre 8,2 Md€ en 2023), pour 1,8 million de bénéficiaires (1,7 million en 2023).

Reprise du dialogue ?

« L’accord national interprofessionnel du 18 février 2025 consolide les GPS et le CTIP, dont le rôle politique et social est désormais renforcé. Notre responsabilité est de représenter les partenaires sociaux. Notre modèle de gestion paritaire, fondé sur le dialogue social, nous permet de porter leur voix », rappelle Jacques Creyssel. Le président du CTIP attend également une décision importante, prévue le 15 juillet, concernant la taxe sur les conventions d’assurance (TSA) : « Si cette mesure est appliquée par le gouvernement, elle aura forcément un impact sur les assurés, notamment par une hausse des tarifs de couverture. » Il annonce également que le nom du CTIP changera à l’automne 2025.

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