Quinze mois après le début de l’invasion russe en Ukraine, l’heure des comptes a sonné pour les assureurs contraints de se retirer de la zone, suscitant parfois des incompréhensions parmi les entreprises françaises exposées. Une nouvelle donne s’est désormais imposée : l’économie de guerre.
« J’ai décidé d’une opération militaire spéciale. » En quelques mots, ce 24 février 2022, Vladimir Poutine lance ses troupes sur Kiev et propulse l’économie mondiale dans un nouveau cycle dangereux. Car la Russie et l’Ukraine occupent des positions centrales sur les marchés du pétrole, du gaz, mais aussi des céréales, des engrais, comme du palladium, métal précieux pour l’industrie automobile. Dans ces secteurs, « leurs parts cumulées dans le commerce mondial sont au-dessus de 10 % », précise Thierry Apoteker, économiste président de TAC Economics. Les importations françaises en provenance de Russie représentaient 5,7 Md€ en 2020, dont 77 % de pétrole, pour des ventes évaluées par la direction du Trésor à 5,2 Md€ – soit à peine 1,5 % de nos exportations.
Mais la France y était très implantée : avant la guerre, pas moins de 700 filiales d’entreprises françaises étaient installées sur place avec 200 000 salariés à travers le pays, « ce qui faisait de la France le premier recruteur étranger en Russie », résume Jacques Sapir, spécialiste de l’économie russe et directeur d’études à l’école des hautes études en sciences sociales.
Les consommateurs russes sont alors familiers de nos fleurons tricolores Accor, Air Liquide, Auchan, Bel, Danone, Decathlon, Leroy Merlin, Stellantis (ex-PSA), Saint-Gobain, Société générale, Schneider Electric… Trente-cinq groupes du CAC 40 qui se retrouvent, d’un coup, en première ligne : d’abord les violences et destructions de la guerre. Puis leurs chaînes de valeur qui subissent des problèmes d’approvisionnement en raison des difficultés de production.