Dans un courrier du 16 juin 2016, l’intersyndicale demande à Marisol Touraine le rétablissement des clauses de désignation en prévoyance. Pensez-vous que cela puisse aboutir ?
C’est un débat qui oppose d’une certaine manière le droit du travail et le droit de la concurrence. La protection sociale fait partie intégrante des éléments de rémunération différée, et donc de la politique d’attractivité et de fidélisation des talents d’une entreprise comme d’une branche professionnelle.
Quelle est la spécificité du risque prévoyance ?
Contrairement au risque santé, la prévoyance est un risque long, avec une occurrence faible des sinistres mais impliquant des coûts élevés. La mutualisation ne peut donc se faire que sur une population de taille conséquente. Sur un marché de libre concurrence, une grande entreprise, du fait du nombre de ses collaborateurs, va pouvoir bénéficier d’un régime de couverture et d’un tarif spécifiques. En revanche, le rapport est inégal entre un assureur et une petite entreprise de quelques salariés qui va se voir proposer une couverture à un tarif standard, forfaitairement majoré si elle présente certaines caractéristiques, donc parfois élevé, sans vraiment pouvoir faire jouer la concurrence. Par ailleurs, deux entreprises d’un même secteur peuvent obtenir un régime identique à des tarifs différents auprès du même assureur (en raison de critères géographiques, d’âge des salariés, etc.). La mutualisation professionnelle homogénéise garanties et coût de la protection sociale au sein d’une branche et évite les distorsions de concurrence. Elle permet également à la branche de financer, grâce aux excédents du régime, des actions de prévention ciblées sur des pathologies propres à la population d’une même profession.