L’année 2023 se révèle particulièrement sinistrée pour l’assurance spatiale. La faute en revient aux dysfonctionnements de deux gros satellites dont la valeur assurée additionnée dépasse de loin l’ensemble des primes acquises par les assureurs du spatial en une année. Mais pas seulement.
L’assurance spatiale connaît en 2023 une année particulièrement difficile. Si le montant des primes récoltées est peu ou prou conforme à celui de ces dernières années – et s’établira entre 500 et 600 M$ – les sinistres payés ont, eux, explosé. Ces derniers, selon les experts de Marsh, Aon, Axa XL, WTW ou encore ceux de l’ESA (Agence spatiale européenne) que nous avons interrogés, s’établiront entre 950 M$ et un peu plus d’un milliard de dollars. Une grande part de ce résultat négatif provient des sinistres de deux gros satellites. L’antenne déployable d’un ViaSat 3 n’a pas fonctionné, tandis qu’un autre, un Inmarsat, à la technologie pourtant éprouvée, n’a plus donné de signe de vie lors de sa mise en orbite. La valeur assurée de ces deux sinistres dépasse déjà les 700 M$.
Des capacités déléguées au compte-gouttes
Ce déficit vient ronger les bénéfices accumulés depuis 2019, dernier exercice fortement sinistré pour l’assurance spatiale. Le microcosme s’inquiète et les négociations vont bon train. Les assureurs discutent avec leurs réassureurs, tout en souhaitant faire doubler les niveaux de primes acquittées par les clients. De leur côté, les agences de souscription, très présentes sur ce marché de l’assurance spatiale, renouvellent en ce moment les capacités déléguées par leurs membres. Les acteurs craignent une diminution de la capacité globale et que les récents retraits du marché ne fassent tache d’huile. Brit Insurance vient ainsi d’annoncer qu’elle cessait de souscrire les risques du spatial, ce qui vient s’ajouter aux départs de Swiss Re, AIG, ou encore Allianz, pour ne compter que les assureurs historiques qui ont quitté le marché depuis la dernière crise, de 2019 donc. Le résultat des négociations, c’est-à-dire la capacité financière totale de l’assurance spatiale pour 2024, sera révélé dans les prochaines semaines.
La vie en orbite basse s'auto-assure
En février prochain, La Tribune de l’assurance reviendra sur les tendances lourdes et émergentes du marché de l’assurance spatiale ainsi que sur les causes et conséquences de cette annus horribilis. En attendant, ce sont les constellations de satellites en orbite basse et notamment la plus importante d’entre elle, Starlink d’Elon Musk, qui sont montrées du doigt. Le milliardaire américain a choisi de ne pas assurer les lancements et la vie en orbite de ses satellites. S’il a besoin de vingt satellites, par exemple, pour tel service, il en lancera vingt-deux ou vingt-trois pour que si quelques-uns s’avèrent défectueux, d’autres puissent prendre le relais. Elon Musk n’est pas le seul à ignorer le marché de l’assurance spatiale. Selon l’ESA, sur les 6 100 satellites en orbite basse à l’heure actuelle, seuls 63 sont assurés, soit un peu plus d’un pourcent, alors qu’un satellite géostationnaire sur deux environ est assuré. Cela occasionne un manque à gagner évident pour l’assurance spatiale, même si ce n’est pas la seule raison qui explique le mauvais résultat annuel qui se profile.