Le groupe Bolloré est un logisticien, un commissionnaire de transport et un opérateur portuaire présent dans plus de 110 pays. À l’occasion du rendez-vous annuel ParisMat fin juin, Sylvain Mulliez, le directeur des assurances du groupe, est revenu pour La Tribune de l’assurance sur la complexification de la supply chain et la maîtrise des risques.
Quelle est votre stratégie de réduction des risques de supply chain liés à la pandémie et à la guerre en Ukraine ?
Le risque Covid-19 est une problématique d’organisation qui porte sur un cas de force majeure mondial ; le groupe Bolloré n’est pas trop exposé en termes de responsabilité. En revanche, nous avons un énorme devoir auprès de nos clients d’acheminer les marchandises, c’est donc l’opérationnel qui est compliqué à gérer avec nos équipes. Sur le dossier de la guerre en Ukraine, nous avons un sujet majeur à gérer : l’impossibilité de transport dans les zones très dangereuses. Nous marchons main dans la main avec nos assureurs et nos clients pour définir les règles de transport et arriver à des régimes de responsabilité particuliers qui vont être des renonciations à recours de la part de nos clients sur le territoire ukrainien. Les sanctions économiques à l’encontre de la Russie compliquent la donne. L’Ukraine commence à s’ouvrir et nous travaillons avec nos assureurs pour remettre en place des garanties tous risques marchandises transportées et risque de guerre. Le groupe Bolloré a un courtier unique (Diot-Siaci) et un pool d’assureurs responsabilité civile qui est emmené par Helvetia.
Comment gérer le risque supply chain au regard du « stop and go » pour expédier des marchandises ?
Nous sommes en extrême tension sur la logistique et on voit bien que le moindre grain de sable dans la supply chain va tout fausser. Un des risques émergents, ce sont les risques sociaux liés à la congestion des ports mondiaux. Les ports ne sont plus capables d’absorber les pics de saisonnalité. Cette tension sociale est à la fois liée à la pandémie, à l’inflation et à la pénurie de main d’œuvre. La tendance c’est d’avoir de plus petits navires car quand un port est en grève cela permet d’aller dans un autre port.
Le transport maritime est-il plus complexe que l’aérien actuellement ?
Les deux modes de transport sont compliqués pour un logisticien compte tenu des goulets d’étranglement (congestion portuaire, pénuries de main-d’œuvre). L’aérien présente une autre problématique : 90 % des marchandises sont transportées sur des avions passagers. La pandémie a considérablement réduit l’offre passagers qui se reconstitue peu à peu en 2022, mais nous ne sommes pas revenus à la situation d’avant Covid-19. Le manque de capacité reste important à tel point que les compagnies aériennes reviennent avec des avions cargo. CMA CGM se lance dans le fret aérien comme l’armateur danois MSC. Miser sur de gros avions cargos implique d’avoir des hubs logistiques conséquents, lesquels sont tout aussi congestionnés que les grands ports mondiaux comme Long Beach à Los Angeles. Nous essayons de trouver des petits hubs aériens comme Liège, Luxembourg, ou Vatry en France. Seul bémol, ces petits aéroports dédiés au fret sont vite saturés par la concurrence. Cet écosystème se met en place mais je ne dirai pas que la logistique aérienne est plus simple que le transport maritime.