Patricia Lacoste, la dirigeante du Groupe Prévoir, revient sur la stratégie et les perspectives de l’entreprise, ses résultats techniques pour 2024, ainsi que sur son évolution dans le secteur du courtage avec AssurOne.
Prévoir est un groupe centenaire, indépendant et familial. Qu’est-ce qui constitue son ADN aujourd’hui ?
Prévoir, c’est avant tout une histoire de protection de la personne, de solidité, de proximité et d’engagement humain. Depuis 1910, notre mission est restée inchangée : protéger les personnes les plus vulnérables, quels que soient leur parcours, leur situation ou leur métier. Ce qui fait notre singularité, c’est notre structure actionnariale stable : 70 % de l’entreprise est détenue par les quatre familles fondatrices, et 30 % par les salariés, les anciens salariés et leur famille. Cela garantit une vision de long terme, indépendante des logiques court-termistes du marché.
Quels sont vos métiers historiques ?
Nous avons trois métiers : tout d'abord l’assurance de personnes portée par Prévoir vie (individuelle vie et non-vie) avec un résultat de 40 M€. C’est une clientèle modeste alors nous faisons, proportionnellement, plus de prévoyance et de risques longs que d’épargne par rapport à la moyenne du marché français. Le deuxième métier est la gestion d’actifs. Notre filiale Prévoir Asset Management gère les actifs des assurés et des actionnaires. C’est une société de douze personnes avec un résultat positif de 6 M€. Elle commercialise également des fonds actions, auprès d’institutionnels notamment. Le troisième métier est le courtage, depuis 2019, avec AssurOne, Utwin, et Réassurez-moi. La contribution du courtage au résultat du groupe est négative cette année du fait des difficultés d’AssurOne.
Quel rôle joue la Société Centrale Prévoir dans cette gouvernance ?
La Société Centrale Prévoir est la société consolidante du groupe. Elle joue un rôle essentiel de pilotage stratégique, financier et opérationnel. En 2024, sa contribution aux résultats du groupe atteint 24,3 M€, malgré une hausse des charges financières. Elle incarne notre stabilité et notre capacité à investir dans l’avenir tout en assurant la cohérence globale de nos actions.
Le groupe a publié un chiffre d’affaires en forte progression. Quels sont les faits saillants ?
Nous avons réalisé en 2024 un chiffre d’affaires brut consolidé de 640,9 M€, en hausse de 12,3 % par rapport à 2023. C’est une croissance significative dans le secteur de l’assurance liée à la bonne dynamique commerciale de notre réseau et de nos partenariats en marque blanche. Nos fonds propres atteignent 847,6 M€, en hausse de 2,9 %, ce qui traduit notre assise financière robuste. Le résultat net consolidé s’élève à 49,7 M€, en retrait de 9,5 %, principalement en raison des investissements engagés dans la transformation du pôle courtage.
Comment expliquer cette baisse du résultat net malgré la croissance du chiffre d’affaires ?
Cette baisse s’explique par des efforts volontaristes de transformation dans certaines filiales, notamment AssurOne. Nous avons fait le choix stratégique d’investir massivement pour restaurer la rentabilité à l'horizon de cinq ans. Ces choix peuvent peser temporairement sur nos résultats, mais ils sont essentiels pour construire une performance durable.
Quels sont les résultats du pôle assurance en 2024 ?
L’assurance représente 90,5 % du chiffre d’affaires brut du groupe, soit 579,3 M€, en hausse de 14,6 %. Le résultat net de Prévoir-Vie s’élève à 40,2 M€, en progression par rapport à 2023. Ce sont des performances solides qui confirment la pertinence de notre modèle économique, basé sur la proximité, le conseil et la spécialisation en assurance de personnes. Nous avons renforcé à la fois notre réseau salarié et nos partenariats en marque blanche. Notre réseau commercial continue de croître en effectif et en expertise, avec une orientation forte vers la qualité de conseil. Cela se traduit par une progression continue de nos encours et de notre activité. Nous privilégions une approche humaine, de proximité, sur le terrain. Nos conseillers accompagnent leurs clients dans la durée, avec une compréhension fine de leurs besoins. Cela crée une vraie relation de confiance, facteur clé dans notre secteur.
Et ceux du pôle courtage ?
Le courtage représente 8,1 % du chiffre d’affaires brut et 21,5 % du chiffre d’affaires net. En 2024, la contribution du pôle est négative (-16,2 M€), mais il faut distinguer les situations. Utwin affiche une croissance rentable. AssurOne est en pleine transformation. Réassurez-moi est en repositionnement. Et la cession de Stello a permis de recentrer nos efforts.
Pourquoi le CA et le résultat d’AssurOne sont-ils encore négatifs ?
Cela vient d’une baisse importante du CA à la fois en portefeuille et en affaires nouvelles. Elle n’a pas été compensée par une baisse des charges. AssurOne avait connu un beau succès commercial, notamment sur un produit auto destiné aux jeunes, mais ce développement commercial n’était pas rentable pour les assureurs. L’objectif est donc de recréer des produits pilotés techniquement qui permettent à la fois à l’assureur et aux courtiers de gagner leur vie pour remonter le CA, tout en travaillant en même temps sur la maîtrise des coûts. Nous avons lancé un plan de transformation basé sur un audit externe. L’objectif est clair : avec notre business review mise en place l’an dernier, nous voulons restaurer la rentabilité d’ici cinq ans en accompagnant AssurOne dans un plan de redressement. Cela passe par une nouvelle feuille de route. À la suite de cette étude, nous avons embauché un nouveau DG et une nouvelle équipe, opéré un repositionnement stratégique, et renforcé l’accompagnement de la maison mère. Le résultat net 2024 d’AssurOne est de -16,4 M€ (-11 M€ en 2023), mais c’est un passage nécessaire. Nous accompagnons cette transformation par un investissement financier important dans le système d’information, mais aussi par des actions concrètes sur le développement commercial, l’offre ainsi que l’organisation, la relation client et l’outil technologique. L’idée est de bâtir une plate-forme de courtage plus agile et plus rentable.
Quels sont les ressorts de la croissance d'Utwin ?
Utwin a généré un chiffre d’affaires de 10,3 M€, en hausse de 11,2 %, et un résultat net de 1,2 M€, en progression de 46 %. La société finance seule sa diversification vers la santé, ce qui montre sa solidité. C’est une belle réussite dans l’univers du courtage digital.
Réassurez-moi fait également l’objet d’une réflexion stratégique ?
Oui. Les mutations du référencement naturel, l’IA et les habitudes de consommation en ligne nous amènent à repenser le positionnement de Réassurez-moi. Nous travaillons à renforcer ses synergies avec le reste du groupe et à identifier de nouveaux leviers de croissance.
Pourquoi avoir cédé Stello ?
Malgré son potentiel, Stello n’atteignait pas la rentabilité attendue. La décision a été prise de recentrer nos priorités. La cession à Simplis (groupe Odéalim) effective en décembre 2024 permet à la start-up de poursuivre son développement dans un cadre mieux adapté.