Épargne

Les recettes du Sénat pour une épargne à moindres frais

Publié le 12 octobre 2021 à 17h53

Elisabeth Torres    Temps de lecture 5 minutes

Le marché de l’épargne français se distingue par des frais élevés qui viennent rogner la performance offerte aux épargnants, en particulier du fait des rétrocessions. Dans un rapport présenté à la Commission des finances, deux sénateurs ont émis dix-sept recommandations pour faire baisser ces frais. 

La persistance de taux obligataires faibles diminue les rendements, tandis que la crise sanitaire a engendré une épargne de précaution (115 Md€ en 2020 selon la Banque de France). Comment mieux protéger les épargnants dans ce contexte ? Quelles sont les conditions nécessaires pour qu’ils puissent faire fructifier leur épargne ? C’est l’enjeu que se sont fixé Jean-François Husson, rapporteur général de la Commission des finances, sénateur de la Meurthe-et-Moselle, et Albéric de Montgolfier, vice-président de la commission, sénateur d’Eure-et-Loir, dans le rapport qu’ils ont présenté le 6 octobre dernier à la Commission des finances. Le titre du document sonne d’ailleurs comme un slogan : « La protection des épargnants, payer moins et gagner plus ».

De fait, le marché français présente quelques caractéristiques au regard de ses voisins européens, à commencer par un taux d’épargne des ménages parmi les plus élevés, mais aussi des frais de gestion prohibitifs qui placent la France dans la moyenne haute du classement européen. Au nombre des causes invoquées par les sénateurs, l’encours moyen par fonds plus faible sur le marché français : 168 M€ en France en 2018, contre par exemple 312 M€ en Allemagne. Cette particularité limite les économies d’échelle et accroît les frais supportés par les épargnants français. Autre spécificité, une forte culture du conseil, avec diverses conséquences : les épargnants ne vont pas vers la gestion passive indicielle (ETF), pourtant moins coûteuse. Par ailleurs, les Français n’adhèrent pas à l’idée que ce conseil dont ils sont si friands leur soit facturé sous forme d’honoraires, d’où la pratique des rétrocessions qui alourdissent les frais de gestion et pénalisent la performance, notamment à long terme. À titre d’illustration, le rapport pose l’hypothèse d’un investissement initial de 5 000 € et de versements mensuels de 100 € dans un portefeuille composite : après dix ans, 17 % du rendement net est capté par les frais, et après quarante ans, c’est même 47 % de la performance qui est perdue. Quant au rendement supérieur de la gestion passive, il est mis en évidence par un comparatif de la performance nette moyenne des fonds actions dans l’Union européenne en fonction de leur mode de gestion :  à quarante ans, elle s’élève à 710 238 € pour un investissement dans des fonds actions en gestion passive, contre 582 682 € en gestion active, soit un différentiel de 127 556 € en faveur de la gestion passive.

 Limiter la casse

Afin d’améliorer la sécurité des épargnants, les sénateurs ont émis quelque dix-sept recommandations selon quatre axes : encadrement des frais, transparence, adaptation des produits et contrôle des intermédiaires. « Nous avons exclu la suppression pure et simple des rétrocessions de commissions, a indiqué Jean-François Husson, car les Français sont réfractaires au paiement d’honoraires, or, ce serait la seule alternative à cette suppression, mais elle pourrait se traduire par une proposition moins diverse de produits, défavorable aux épargnants. » Les sénateurs préconisent en revanche d’encadrer les frais des intermédiaires, en interdisant les commissions de mouvement perçues à l’occasion d’opérations d’achat ou de vente, qui peuvent être en effet « une incitation à faire tourner le portefeuille sans justification économique ou financière ». Ils proposent également d’encadrer les commissions de surperformance, part variable des commissions de gestion, ou encore d’aligner les règles applicables aux assureurs en matière de mandats d’arbitrage en assurance vie sur le cadre en vigueur pour les sociétés de gestion de portefeuille, plus contraignant. En matière de transparence, les sénateurs soulèvent l’effet contre-productif du « millefeuille d’informations » engendré par la réglementation, peu lisible par les investisseurs. Ils suggèrent ainsi la mise en place, pourquoi pas par l’ACPR, d’un comparateur public des frais moyens d’assurance vie. Ils proposent en outre d’orienter davantage les épargnants vers des produits indiciels en rendant obligatoire leur référencement dans les produits d’épargne. Améliorer la transférabilité des contrats d’assurance vie est un autre levier pour que les épargnants bénéficient de contrats plus performants. Le rapport propose à cet effet de clarifier les modalités de transfert en vue de les harmoniser et les automatiser.

Le PER en est pour ses frais

Les rapporteurs souhaitent favoriser le développement du PER dans lequel ils voient « un produit particulièrement adapté à l’investissement de long terme et à la préparation de la retraite ». Ils proposent en conséquence d’encourager la migration de l’assurance vie vers les PER par la prorogation au-delà du 1er janvier 2023 de l’incitation fiscale mise en place à cette fin par la loi Pacte. Ils préconisent de plus le développement d’un PER reposant sur des fonds indiciels, dont la gestion serait, par exemple, assurée par la Caisse des dépôts. Mais dans un rapport rendu public fin juillet, le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) a pointé une accumulation de frais pesant sur le rendement des PERin assurance et recommandé en conséquence d’offrir aux épargnants une information complète sur les frais avant la souscription, d’afficher les frais totaux, et de permettre une comparabilité des offres. Bercy travaille à un accord de place pour y parvenir.

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