À la tête de la FFA, Florence Lustman revient sur la collecte en vie, l'eurocroissance et le PER (retrouvez l'intégralité de cette interview dans le numéro de décembre de La Tribune de l'assurance).
Comment analysez-vous les chiffres de l’assurance vie et quelle prospective en faites-vous ?
Les cotisations en assurance vie s’élevaient à 111,4 Md€ à fin septembre, en hausse de 29,2 Md€ par rapport à la même période en 2020, et la collecte nette est positive à près de 16 Md€ alors qu’elle était négative (-4 Md€) sur neuf mois l’an dernier et l’avait d’ailleurs été sur l’ensemble de l’exercice. Cela a évidemment un impact sur les encours qui augmentent eux aussi pour atteindre 1847 Md€, en hausse de 4,7% sur une année glissante. Globalement, ces chiffres confirment l’appétence des Français pour l’assurance vie. L’activité a connu certes un accident de collecte en 2020, lié au premier confinement qui a empêché les distributeurs d’assurance d’exercer leur métier. Or, l’assurance vie est un produit qui se vend bien plus qu’il ne s’achète. Ces chiffres confirment également que l’assurance vie est le produit d’épargne de confiance aux yeux des Français. Il est vital pour notre économie de remettre au travail l’épargne excédentaire et improductive accumulée sur les comptes courants en la drainant vers l’assurance vie, investie, je le rappelle, à 60% dans les entreprises ce qui finance donc l’économie productive. L’enjeu du moment me paraît être ainsi de poursuivre notre démarche de conseil afin de diriger les poches d’épargne à court terme, improductives comme le livret A, vers l’assurance vie. Le débat sur la retraite a également eu le mérite de rappeler aux Français qu’il est prudent d’épargner pour sa retraite. L’assurance vie sert à cela ainsi que le PER, produit particulièrement dynamique.
La montée en puissance des UC vous paraît-elle pérenne ?
Il s’agit d’une tendance qui se poursuit depuis plusieurs années et qui tient au fait que les Français souhaitent conserver un produit de confiance tout en améliorant l’espérance de performance sur le long terme. Selon leur profil d’investisseur et leur projet d’investissement, les épargnants diversifient davantage leur assurance vie grâce aux UC, sachant qu’il existe toute une palette d’unités de compte, plus ou moins risquées. L’année 2021 confirme cette tendance de fond en assurance vie.
Qu’en est-il du fonds eurocroissance ?
Ce produit plus complexe ne s’adresse pas aux mêmes clients que l’assurance vie et le PER. Les encours des supports eurocroissance représentent 3,3 Md€ à fin 2020, soit une progression de 8,9% par rapport à 2019. L’eurocroissance, à fin septembre 2021, voit son encours progresser significativement de +28% sur un an. Ce produit s’installe dans le paysage.
Bercy se félicite du succès du PER tout en pointant des frais trop élevés. Où en est l’accord de place souhaité par les pouvoirs publics pour les contenir ?
Il ne faut pas perdre de vue que les frais du PER ou de l’assurance vie financent des prestations de service qui ont un coût. Les assureurs les surveillent évidemment de près, d’autant plus que le contexte du marché de l’assurance est hyper concurrentiel en France. Ces prestations de service sont de plusieurs ordres, à commencer par le conseil au client qui est systématique en assurance vie de par la réglementation. Le temps passé et les compétences du conseiller, il faut bien les rémunérer : c’est la valeur du conseil. Et au-delà de ce qui tient directement au contrat lui-même, il y a des charges indirectes, induites par la réglementation à laquelle nous sommes soumis : gestion de la conformité, des risques, audit, autant de strates qui engendrent des coûts. Voilà ce qui explique les frais en assurance vie.
Sur la contribution des assureurs à la retraite complémentaire des agents généraux d’assurance, vous vouliez revenir sur la contribution des compagnies avant de trouver un accord avec Agéa. Allez-vous encore défendre cette thèse lors des prochaines discussions en 2024 ?
Le dernier accord entre la FFA et Agéa portant sur le RCO des agents généraux, conclu fin 2020 pour un an, vient à échéance fin 2021. Des discussions entre les deux fédérations ont eu lieu depuis mai et s’inscrivent dans le processus normal conduisant à l’élaboration d’un tel accord. À ce stade, les discussions ont permis de faire émerger des dispositions communes qui restent à présenter aux instances statutaires de chacune des deux fédérations : pour la FFA ces dispositions seront présentées à l’AG de mi-décembre.
Y aura-t-il des négociations sociales dans l’assurance, à l’heure où la question du pouvoir d’achat monte en puissance ? Quid de l’attractivité du secteur face aux difficultés pour recruter ?
Sur le sujet du pouvoir d’achat au sein de la branche, les négociations annuelles (NAO) commencent à peine dans les entreprises et vont s’étaler jusqu’en début d’année prochaine. Il sera temps d’en faire le bilan début 2022. Les négociations de branche sur les minima ne débuteront qu’au printemps, comme d’habitude. Le secteur de l’assurance a réaffirmé en 2020 son engagement pour l’emploi avec plus de 15 000 embauches, sa troisième meilleure année au cours de la décennie, qui atteste de la forte attractivité du secteur. Les recrutements s’effectuent majoritairement en CDI (54%). Par ailleurs, 30% des nouveaux entrants ont le statut de cadre.
Comme beaucoup d’autres secteurs, nous sommes confrontés à des viviers insuffisants sur certains métiers très pointus : l’informatique ou l’actuariat. Le phénomène n’est cependant pas nouveau. En lien avec la reprise économique, certains bassins d’emplois connaissent des tensions (Nantes, Bordeaux, Lyon…). Nous redoublons nos efforts en matière de promotion des métiers avec des participations à de nombreux salons et forums sur tout le territoire, ou encore avec le déploiement de nouveaux outils de communication développés avec les intermédiaires d’assurance, l’assistance et l’opérateur de compétence Atlas. Nous redoublons également d’énergie pour faciliter les recrutements de travailleurs handicapés.