Yann Bocquillon, directeur général d’Ixi groupe

« Le risque d’embouteillage est fort au printemps pour les experts »

Publié le 22 février 2024 à 9h00

Louis Johen    Temps de lecture 4 minutes

À la tête d'Ixi groupe, Yann Bocquillon dresse le bilan 2023 de la sinistralité climatique, de la profession d’expert et de son réseau d'indépendants.

Quel bilan tirez-vous de la sinistralité climatique 2023 ?

Sur les dix dernières années, 2023 apparaît comme la plus forte en termes de missionnement sur les climatiques. Avec 10 800 missions, nous sommes à 25 % d’activité en plus par rapport à 2019, qui était jusque-là notre référence la plus élevée. Comme nous l’attendions, ce sont surtout les dossiers « sécheresse et retrait-gonflement des argiles » qui auront pesé le plus lourdement. Ils représentent plus de la moitié de nos missions catastrophes naturelles. Au-delà d’un bilan annuel, l’observation sur longue période indique clairement la part croissante des climatiques dans l’activité générale de l’expert.

Quels enseignements avez-vous tiré de la séquence des inondations à répétition dans le Nord de la France où assureurs et experts ont été mis sous pression par les pouvoirs publics ?

Chaque événement climatique de grande ampleur est l’occasion de retirer de nombreux enseignements pour mieux se préparer à de tels aléas. Ainsi, nous avons repris début 2024 toute notre organisation de gestion des événements climatiques et renforcé plusieurs dispositifs d’accompagnement de nos clients comme la cellule de crise, les indicateurs de suivi des flux de missions et même les budgets à engager pour prendre en charge les déplacements et l’hébergement des experts venant en renfort, y compris en outre-mer. Les deux cyclones sur l’île de la Réunion ont hélas immédiatement mis à l’épreuve ces évolutions organisationnelles.

La capacité de mobilisation des experts pourra-t-elle répondre aux attentes alors même que la sinistralité climatique 2023 a déjà bien rempli leur carnet de bal ?

Nous avons géré un premier flux de dossiers mais les vraies questions vont arriver sur le premier quadrimestre 2024 où nous toucherons du doigt la résilience de l’ensemble des réseaux d’expertise : tempêtes en Bretagne et en Normandie, puis inondations dans les Hauts-de-France en fin d’année 2023 et à nouveau en début d’année 2024 s’ajoutant aux encours sécheresse. Cela risque « d’embouteiller » toute la profession avec un point d’alarme possible autour du printemps.

Les bilans de début d’année de la profession seront forcément contrastés sur le volet « qualité ». Les volumes sont importants et les délais s’allongent. Cela peut générer de l’insatisfaction chez les assurés, donc les assureurs, malgré les efforts déployés par la profession.

Nous devons aussi considérer que de nouveaux arrêtés Cat Nat pour sécheresse au titre de 2023 seront publiés prochainement, avec néanmoins des volumes attendus au tiers de ceux de l’an dernier. Tout ceci appelle à la promotion urgente d’actions de prévention des risques et d’audit de sinistralité. Un nouveau marché qu’Ixi groupe investira au printemps.

La profession des experts est sous le feu de critiques dans les médias, comment la profession va-t-elle s’organiser pour y répondre ?

Nous comprenons les critiques mais l’expert ne peut pas être le seul bouc émissaire. De ce que nous observons, le mécontentement qui s’exprime à travers les médias concerne surtout le retrait-gonflement des argiles, qui est une expertise des plus complexes. Au niveau technique, mais aussi sur le plan humain car elle touche à la résidence principale. Il y a une valeur patrimoniale et affective attachée à la maison et l’expert peut cristalliser le mécontentement parce qu’il est au centre du jeu.

Dans ce contexte, les initiatives de certification de la profession pour le retrait-gonflement des argiles vont dans le bon sens. On le voit dans l’expertise construction avec l’obligation d’avoir un agrément CRAC exigeant à obtenir. Un tel agrément serait susceptible de lever les doutes sur la compétence des experts.

Comment s’est déroulée l’exercice 2023 pour Ixi ?

Ixi groupe boucle 2023 sur une croissance d’activité de 10 % qui n’est pas uniquement liées aux climatiques. Nous avons progressé de 15 % en construction, qui est notre activité historique. La protection juridique, qui était une activité régulière et stable, est également repartie à la hausse. Avec plus de 10 000 missions, nous avons refranchi un seuil que nous n’avions plus vu depuis plusieurs années. Tirée par les climatiques, la partie IRD s’est développée sur des pourcentages moindres dans la mesure où l’activité était déjà forte. Enfin, notre filiale de spécialités Ixi plus, avec ces 12 pôles d’intervention, voit son missionnement progresser de 30 %. CPA experts, cabinet spécialiste réputé et « vaisseau amiral » de notre réseau de spécialistes, a été un des principaux artisans de cette dynamique, notamment sur les risques spéciaux ou la cybersécurité.

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