Transport en mer Rouge

Le risque de guerre sous l'emprise de la régionalisation

Publié le 21 août 2024 à 9h00

Louis Guarino    Temps de lecture 3 minutes

En l’espace de dix mois, les attaques des rebelles houthis en mer Rouge ont attisé les craintes de tout l’écosystème de la supply chain, assureurs maritimes en tête. Depuis l’attaque d’Israël par le Hamas le 7 octobre dernier, les tirs de missiles et l’envoi de drones sur les navires marchands et de guerre américains ont redoublé.

Fin juin, le groupement des assureurs des risques exceptionnels (Garex) – la vigie des risques géopolitiques avec le Cesam et la plate-forme Grimm Partners – recensait pas moins de 270 incidents en mer Rouge dont 3 graves (le Rubymar, le Galaxy Leader et le Tutor). « Ce sont des dommages matériels et malheureusement humains. Les risques sont des retards, des conséquences sur la supply chain et des congestions portuaires, explique Mathieu Daubin, le président du Garex*. D’après les estimations, 20 à 30 navires transitent chaque jour par le détroit de Bab-el-Manded, lequel sépare la péninsule arabique de l’Afrique. Ces navires sont assurés. Pourtant, quand on regarde l’assurance et les risques de guerre, ce ne sont pas des notions facilement conciliables. Il y a néanmoins un aléa dans le risque de guerre et les assureurs sont experts dans l’évaluation et la notation de ce risque. En fonction, ils octroient un taux et un niveau de prime. »

Régionalisation

Pour l’heure, l’escalade à l'œuvre est susceptible de déclencher un embrasement régional au Moyen-Orient. « L’attaque par Israël sur le port yéménite de Hodeidah le week-end du 20 juillet confirme le caractère extrêmement risqué de cette région pour toute l’activité du transport maritime, décrypte pour sa part Frédéric Denèfle, le président de l’Union internationale des assurances maritimes (IUMI). Cela vient conforter le point de vue que le Garex a depuis un certain temps, c’est-à-dire une régionalisation du conflit, des pressions et des attaques de plus en plus récurrentes sur le domaine maritime ou sur les infrastructures qui participent au transport maritime dans la zone. » Résultat, les attaques entraînent des dommages matériels sur les navires, des déclarations d’avaries communes. « La priorité initiale de tous les armateurs, c’est de sécuriser la vie humaine des équipages, détaille Frédéric Denèfle. Au-delà de ce sentiment partagé par les opérateurs du shipping et par leurs assureurs – les P&I, les assureurs "corps" ou "cargaisons" – il y a une difficulté à appréhender l’assurance de ces opérations ainsi que l’administration des sinistres quand ils surviennent. Car cela implique de mettre en place une assistance dans la zone si le navire en a besoin, ce qui fait courir un danger en parallèle aux personnes impliquées dans les opérations d’assistance. »

Du reste, l’efficacité de la mission Aspides déployée par l’Union européenne en février pour protéger la sécurité maritime en mer Rouge paraît limitée. « Les assureurs maritimes ne sont que les représentants du secteur. Nous n’avons pas les pouvoirs d’influence d’un État qui peut protéger, accompagner, organiser le trafic maritime de façon à le sécuriser au maximum, tranche Frédéric Denèfle. Notre rôle est d’accompagner nos assurés de façon à ce que les organisations internationales politiques réalisent ce qui est en train de se passer localement et qu'elles perçoivent la même réalité que les agents économiques (armateurs, affréteurs, importateurs de marchandises). » Dont acte.

* intervention de Mathieu Daubin lors de la table ronde organisée à ParisMat le 25 juin : « Risques géopolitiques : vers un monde toujours plus fragmenté ».

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