Alors que le débat parlementaire avance avec l'adoption en Commission des finances de la PPL sur l'indemnisation du risque de RGA, la Caisse centrale de réassurance (CCR) profite de la présentation de ses résultats pour rappeler la nécessité de consolider le régime Cat Nat face au dérèglement climatique.
L’année 2022 n’aura pas non plus épargné la réassurance publique, frappée de plein fouet par la sécheresse et plus particulièrement par le risque associé du retrait gonflement des sols argileux (RGA). Son coût est estimé à 2,9 Md€ pour le marché (dont 1,8 Md€ pour CCR), selon la Caisse centrale de réassurance (CCR).
Aucun autre événement significatif n’est venu s’ajouter à cette charge et la sinistralité est moindre qu’en 2021. Toutefois, combinée à l’inflation qui a augmenté les coûts de reconstruction et donc des sinistres, la charge totale de l’exercice 2022 pour CCR est évaluée à 1 768 M€ (contre 323 M€ en 2021). CCR conclut 2022 avec un chiffre d’affaires en hausse (+2,5 %) atteignant 1 080 M€ mais a vu son bénéfice net divisé par deux, 67 M€ en 2022 contre 134 M€ en 2021.
Pour faire face à cette sinistralité exceptionnelle, CCR a provisionné le régime Cat Nat de 1 183 M€ en provisions d’égalisation. En 2023, la CCR peut ainsi prendre à sa charge une sinistralité de 2 Md€, sans faire appel à la garantie de l’État, en baisse de 1 Md€ par rapport à 2022. « C’est très juste comme enveloppe. C’est le moment de se poser la question de l’équilibre à long terme du régime », réagit Jacques Le Pape, président de CCR.
Le débat de la surprime relancé
Ces chiffres viennent alimenter le débat politique puisqu’un rapport parlementaire d’évaluation sur le risque sécheresse, porté par les députées Sandrine Rousseau et Sandra Marsaud, propose de réformer le financement du régime Cat Nat via une augmentation de la surprime (de 12 % actuellement) pour mieux prendre en charge les sinistres de RGA et pérenniser le régime. « En tant qu’institut technique, nous ne prenons pas part aux débats politiques mais nous les alimentons grâce à nos chiffres, dont les derniers en date sont actuels et très explicites », commente Jacques Le Pape. La proposition de loi qui en découle, déposée en février 2023, a été adoptée avec modifications par la Commission des finances de l'Assemblée nationale ce mercredi.
Alors que la sinistralité 2022 a été « la plus coûteuse jamais enregistrée » pour le régime d'après la CCR, « le conseil d’administration estime que [les réserves] ne sont plus nécessairement suffisantes pour couvrir à la fois l’amélioration de l’indemnisation décidée en 2022 et les effets du dérèglement climatique sur la sinistralité. La question des moyens du régime et du niveau de surprime, aujourd’hui à 12 %, se pose donc dès cette année », indique-t-il.
Si plusieurs solutions existent, Jacques Le Pape estime toutefois que « l’augmentation des primes est, au niveau technique, la façon la plus naturelle de résoudre une augmentation des sinistres ».
CCR Re sur les rails
De son côté, la filiale de réassurance privée CCR Re poursuit sa trajectoire de croissance avec un chiffre d’affaires de 987 M€ en 2022 (+17 % par rapport à 2021), un résultat net de 42M€, stable par rapport à 2021 (41 M€) et un ratio de solvabilité de 205 %. Également touché par la sinistralité exceptionnelle, CCR Re affiche toutefois un ratio combiné de 98,7 % (96,6 % en 2021).
La charge liée aux catastrophes naturelles (62 M€ bruts et 35 M€ nets de rétrocession) est là encore moindre qu’en 2021 (79 M€ bruts et 43 M€ nets) mais l’inflation prise en compte, le surcoût des sinistres a entraîné une hausse du ratio combiné. En vie, la rentabilité du portefeuille s’améliore malgré les conséquences de l’inflation, avec une marge technique de 3,6 %.
« Les renouvellements 2023 ont été très positifs pour CCR Re puisque nous avons vu le retour à une tarification techniquement plus favorable. De plus, les opérations en cours qui devraient se réaliser à mi-année apporteront les moyens financiers nécessaires pour poursuivre notre développement », commente Bertrand Labilloy, PDG de CCR Re.
Le groupe avait en effet annoncé une augmentation de capital à hauteur de 200 M€, remportée par le consortium SMA BTP et MACSF qui devrait se concrétiser en 2023. À l’issue de cette opération, le consortium deviendra actionnaire majoritaire du réassureur. L’objectif de cette augmentation de capital est de renforcer les fonds propres de CCR Re pour lui permettre de poursuivre sa croissance. Cela pourrait également être, par ricochet, un moyen d’alimenter les caisses de la maison mère. Pour 2022, le conseil d’administration de CCR Re a voté un dividende de 16,8 M€.