Jean-Paul Babey, président d’Alptis assurances
rédacteur en chef
A quelques jours du grand raout des intermédiaires, rencontre avec le président d’Alptis assurances, le courtier grossiste spécialiste des assurances de personnes, qui fourbit ses armes pour être parmi les premiers à décliner une offre d’épargne retraite supplémentaire post loi Pacte (lire la suite de cet entretien dans le n°249 de La Tribune de l'assurance daté de septembre).
La croissance d’Alptis, de 8 % à 109 M€ de CA 2018, correspond-elle à vos ambitions ?
Cette progression est conforme à notre modèle et à notre plan de route : croître raisonnablement et durablement. C’est le fruit de nos travaux sur le collectif depuis l’ANI et c’est en phase avec notre plan stratégique qui vise à équilibrer nos activités individuelles et collectives. Ce modèle mixte répond à la vocation d’Alptis [Association lyonnaise de prévoyance des travailleurs indépendants et des salariés, NDLR] depuis sa création en 1976.
Justement, quarante ans après la création d’Alptis, son modèle associatif est-il toujours adapté au marché ?
Aujourd’hui, le paysage se modifie, mais notre groupe conserve un positionnement atypique de courtier grossiste associatif, très singulier en France. Pourtant, ce statut original s’inscrit parfaitement dans la modernité, avec trois caractéristiques qui font écho aux préoccupations actuelles.
D’abord, l’accompagnement de chaque client, qui est aussi adhérent de l’association. Depuis l’origine, nous sommes axés sur nos clients, bien plus que sur nos contrats. C’est essentiel dans une activité où le fonctionnement en silos et la lettre d’un contrat prévalent toujours sur l’expérience client et ses besoins.
Le deuxième élément est lié au corpus réglementaire nouveau, je pense notamment à la DDA qui met l’accent sur la prévention des conflits d’intérêts, pour préserver l’intérêt du consommateur. Or, pour nous, cela a toujours été le cas, c’est notre ADN et Alptis a été conçu comme cela, pour apporter le service attendu par les adhérents. J’en veux pour preuve que, dans notre groupe, on s’appuie sur un tiers de salariés et sur deux tiers de bénévoles, des adhérents qui participent à la conception des solutions d’assurance et qui veillent à leur qualité. Ce modèle est ouvert, coopératif et collaboratif. Notre volonté est de construire un écosystème autour des parties prenantes que sont nos clients et nos partenaires, distributeurs indépendants ou assureurs.
Enfin, dernière caractéristique, Alptis développe un modèle transparent. Nos clients font partie de l’association, ils reçoivent le bilan et tous les documents publiés par le groupe.
Votre mode de souscription, qui passe par des contrats groupe ouverts, est-il toujours en phase avec l’assurance d’aujourd’hui ?
L’intérêt de cette démarche, c’est qu’elle correspond d’abord aux clients parce qu’on les écoute avant de fabriquer des contrats et qu’on crée des groupes d’affinités pour coller à leurs besoins. Mais au-delà de ça, face à la montée en puissance du réglementaire qui a tendance à paralyser un peu le secteur qui doit passer par différentes cases – la finance, le juridique, la conformité, etc. – nous restons flexibles avec la capacité de mettre sur le marché des contrats au fur et à mesure des nouvelles réglementations. On voit bien, par exemple dans le secteur de la santé où la réglementation change en permanence, que grâce à ce modèle de souscription, Alptis garde une vraie souplesse ; donc oui clairement, c’est un modèle moderne qui nous confère un avantage.
S’il y a quelques années, les associations pouvaient paraître en décalage, aujourd’hui au contraire, nos clients aiment comprendre ce qu’ils achètent et on est là pour les accompagner.
Nous avons commissionné 6 095 courtiers en 2018. Pour nous, c’est la preuve que notre modèle est autoportant : si Alptis croît, c’est parce que les courtiers nous trouvent pertinents. Lorsque la qualité n’est pas au rendez-vous, la remontée est immédiate avec un conseil d’administration composé exclusivement d’adhérents.
Où en êtes-vous de votre plan stratégique ?
On est à mi-chemin de ce plan, baptisé Prisme 2020. Il doit nous amener à un chiffre d’affaires global groupe de l’ordre de 130 M€ et s'articule autour de trois thèmes forts : grandir, valoriser et s’ouvrir.
Concrètement, grandir, c’est continuer de réaliser notre croissance interne autour de solutions et de mises en main sur le marché qui sont pertinentes à la fois pour nos distributeurs et nos clients. Cela tourne donc beaucoup autour des nouvelles technologies, avec un investissement de 10 M€ dans l’architecture et l’urbanisation de notre système d’information. C’est aussi le renforcement des équipes au contact, notamment dans le collectif.
Pour le thème valoriser, il s’agit de promouvoir et valoriser notre modèle d’entrepreneurs sociétaux qui concilie mission sociétale, bénévolat, fonctionnement participatif et croissance continue de notre proposition de valeur. Pour Alptis, il s’agit de continuer d’avoir une rentabilité raisonnée, ce qui signifie que l’excédent financier que nous réalisons soit intégralement remis au service de l’adhérent et de la croissance. Nous voulons valoriser ce modèle qui est autoportant, qui a les moyens de son développement sans pour autant tomber dans les excès de l’ultra-finance tels qu’on peut les voir ici ou là.
Et le troisième thème : s’ouvrir ?
A de nouvelles idées et de nouveaux partenaires ! Par exemple, nous avons créé pour la retraite une nouvelle filiale baptisée Capvita, mais aussi sur le sujet du financement des entreprises, nous avons pris en fin d’année dernière une participation dans la société Prêt pro, qui accompagne les chefs d’entreprise dans leur besoin de financement avec un modèle assez moderne basé sur des plates-formes de data, ou encore avec la création d’une plate-forme de financement participatif : Belend, là encore pour accompagner les projets des entrepreneurs avec qui nous travaillons. Notre ambition est de leur donner accès à un système souple, permettant de répondre rapidement à un besoin, dans un délai d’un mois avec Prêt pro ou dans un délai de dix à quinze jours avec Belend.
L’expertise d’Alptis est large, de la comparaison de garanties jusqu’au portage. On peut offrir à des partenaires des solutions qu’ils ne trouvent pas ailleurs, notamment parce qu’on est capable de les accompagner sur tout ou partie de la chaîne de valeur de l’assurance, et c’est un avantage de pouvoir fournir l’intégralité de la prestation. Notre pôle partenariats, que nous avions initié en créant une joint-venture avec CNP assurances, continue de se développer avec aujourd’hui une demi-douzaine de partenaires.