Interview de la semaine

« L’installation de MIC en France reste conditionnée aux autorisations de la tutelle »

Publié le 16 juillet 2020 à 8h00

Louis Johen

Nicolas Sarkadi, directeur général de MIC Insurance Company

Louis Johen
journaliste

Récemment nommé DG de MIC Insurance Company, Nicolas Sarkadi revient sur les enjeux de l'assurance construction et la feuille de route d'un des survivants de la déroute de Gibraltar.

Après de nombreuses expériences tournées vers les assurances de personnes dans le monde de l’économie sociale, vous débarquez dans l’univers très spécifique de l’assurance construction à la tête de MIC Insurance Company. Comment abordez-vous ce nouveau ch

Sur le plan corporate, les fondamentaux techniques et les contraintes économiques sont les mêmes entre une compagnie et une institution de prévoyance ou une mutuelle.

Concernant les risques couverts, après trente et un ans passés dans les assurances de personnes et bien qu’ayant pratiqué aussi l’IARD au début de ma carrière, j’arrive en effet au sein du secteur de la construction, réputé pour être l’une des branches les plus complexes de l’assurance dommages, même si MIC Insurance Company exerce en France de façon plus globale sur les risques immeuble, multi-risque professionnel ou RC générale.

Quand on regarde de plus près, la construction est un risque long dont on connaît les besoins de provisionnements et qui présente pas mal de similitudes avec l’assurance de personnes.

En étant volontairement réducteurs, certains éminents actuaires vous diront que c’est de l’assurance vie sans table de mortalité… Pour ma part, la nouveauté n’est pas tant dans la longueur du risque mais plutôt dans l’absence de transférabilité des encours entre porteurs successifs.

Vous découvrez aussi un marché qui a été secoué par de nombreuses défaillances d’acteurs étrangers opérant en LPS. Quel regard portez-vous sur ce contexte ?

La loi Adrien Spinetta du 4 janvier 1978 a positionné la France comme un pays avant-gardiste de la protection du propriétaire final. En effet, c’est seulement en 1999, 2001 et 2018 que l’Espagne, l’Italie puis la Belgique ont adopté des dispositifs similaires de sécurisation à dix ans mais sans le même système à double détente dommages-ouvrage + RC décennale.

Ces dernières années en France, nous avons vu des acteurs agissant en LPS réussir, relativement facilement, à prendre une part de marché significative. Si certains d’entre eux, peu délicats, ont agi par malveillance, d’autres ont surtout opéré dans l’ignorance la plus complète des spécificités locales. Dans ce contexte, en tant qu’autorité à la tête du pays le plus abouti en matière de régulation de l’assurance construction, l’ACPR a eu la réaction qu’il fallait pour protéger le consommateur, et son action de sensibilisation auprès de l’EIOPA a également été salutaire pour l’avenir des assurances construction en Europe. Je me souviens du discours du vice-président de l’ACPR qui avait posé les bases d’un principe vertueux : il ne s’agissait pas de remettre en cause le principe de la LPS, qui reste un pilier essentiel du fonctionnement du marché européen, mais de dire qu’un assureur ne peut travailler en LPS qu’à partir du moment où il porte déjà le produit dans son pays natif. C’est simple, logique et fidèle à l’esprit des traités européens.

Vous arrivez alors que les regards du marché de la construction en France continuent d’être braqués sur MIC Insurance, survivant de la déroute des assureurs à Gibraltar. Quelle est votre feuille de route à sa tête ?

MIC est une compagnie fondée par Antonio Morera Vallejo qui, après avoir été l’un des plus jeunes directeurs de Mapfre, œuvre personnellement depuis quarante ans dans le domaine de l’assurance via de nombreux organismes. Il est une personnalité incontournable de l’assurance en Espagne.

MIC est un acteur solidement implanté qui reste l’une des rares compagnies d’assurance familiales en Europe, avec tous les avantages que cela confère en termes de souplesse et de réactivité. Notre compagnie connaît parfaitement le marché de la construction pour lequel nous pensons qu’il y a de la place pour tout le monde. MIC Insurance Company est spécialisée en construction ainsi que sur un portefeuille d’entreprises de petites tailles, et nous voulons continuer à bien faire les choses sur un segment qui implique des spécificités d’approches pas nécessairement faciles à avoir pour les grands acteurs du marché. Comment demander deux ans d’expérience à un entrepreneur qui s’installe et qui est dans l’obligation de s’assurer pour pouvoir commencer à travailler ? Il y a un enjeu de primo activité et si des opérateurs agissant en LPS ont pu prendre 15 % du marché, c’est aussi parce que les principaux opérateurs nationaux ont mis des conditions à l’entrée trop drastiques pour les créateurs d’entreprises du bâtiment.

On comprend aussi que votre arrivée, ainsi que celle d’un directeur général délégué en provenance de la Mutuelle des architectes français (MAF), s’inscrit pleinement dans les démarches de MIC Insurance de s’installer en France...

Toute l’opération reste en effet conditionnée aux autorisations des autorités de tutelle et, essentiellement, de l’ACPR. Nous devons, dans ce cadre, pouvoir présenter deux dirigeants effectifs et quatre responsables fonctions clés (conformité, actuariat, gestion des risques et audit interne). Ma nomination apportera à MIC Insurance Company la connaissance et les leviers de ce qui sera ma sixième direction générale, tandis qu’officiera à mes côtés Renaud de Coquereaumont, expert reconnu ayant vingt ans de pratique dans l’assurance et particulièrement dans le secteur de la construction, en tant qu’ancien directeur administratif et financier dans des filiales d’Axa et à la Mutuelle des architectes français (MAF). C’est à mon avis la meilleure complémentarité DG/DGD.

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