Ivo Hux, directeur France, Benelux et Suisse de Swiss Re
Journaliste
A la veille des Rendez-vous de septembre, Ivo Hux partage sa vision de l'environnement dans lequel évolue actuellement Swiss Re, et nous éclaire sur la stratégie développée par la société sur le marché français.
Comment appréhendez-vous la campagne de renouvellements qui s’engage ? Quel sera le principal message de Swiss Re à l'attention des cédantes ?
Du fait de l’environnement de taux bas, nous dégageons une rentabilité moindre sur les branches longues (construction, corporel auto, RC médicale) du fait des rendements financiers. Il est difficile aujourd’hui d'investir au même rendement que par le passé, ce qui justifie un ajustement des tarifs. Nous aurons donc ce message dans nos négociations avec les cédantes. Parallèlement, pour un discours cohérent, en Cat Nat, si les tarifs continuent à baisser, nous serons amenés à réduire nos capacités.
Le coût engendré par les catastrophes naturelles survenues au 2e trimestre aura-t-il un impact sur les négociations ?
En effet, les nombreux sinistres survenus au second trimestre ont dégradé nos résultats et notre ratio combiné. Nous avons notamment été impactés par les feux de forêts canadiens qui se sont chiffrés à 220 M$ pour Swiss Re, mais aussi par des incendies industriels : celui d’un élevage de volailles en Allemagne a coûté à lui seul 300 M$ à la profession, ou encore celui d’une installation pétrolière au Ghana. Les tremblements de terre qui ont touché l’Equateur et le Japon, les inondations en France et en Allemagne, ainsi que l’épisode de grêle en Hollande fin juin, ont également contribué à l’augmentation de la fréquence des sinistres. Pour autant, le marché ne montre pas encore de signe de retournement.
Quelles seront selon vous les demandes des cédantes concernant les structures et conditions des programmes ?
Nous anticipons une légère augmentation de la demande de capacités sur les programmes Cat Nat (période de retour bicentenaire) mais pas de hausse des rétentions, car ce n’est pas dans l’intérêt des cédantes. Au niveau des clauses, nous prévoyons une demande croissante pour l'agrégation des sinistres RC, cette tendance ayant été déclenchée par l'introduction d'actions de groupe en Europe.
Dans ce contexte, pouvez-vous nous dire quelle est la stratégie développée par Swiss Re sur le marché français ?
Swiss Re détient une large part du marché français de la réassurance, hors CCR. Nous visons à accompagner nos clients dans le temps et n’adoptons donc pas de positions opportunistes. En revanche, nous pouvons compléter nos programmes en intervenant sur des affaires uniques pour nos clients en portefeuille afin de les accompagner dans la gestion de leur capital. En effet, avec Solvabilité II et le contexte de taux bas, la réassurance devient un outil discret, rapide et efficace pour réduire la volatilité et garantir un niveau de rentabilité dans le temps.
Par ailleurs, nous visons à accompagner les cédantes grâce à des services supplémentaires. A titre d'exemple, nous avons racheté une société de télématique qui analyse les données comportementales des conducteurs auto afin de tarifer en fonction de la qualité des risques, et ainsi améliorer l’offre de nos cédantes.
Quel sera l’impact du Brexit sur votre activité en France, et plus largement en Europe ?
Même si nous ne nous attendions pas à un tel résultat du référendum, un groupe de travail a permis d’anticiper les différents scénarios et de maîtriser notre exposition à la volatilité des marchés qui se sont d’ailleurs rapidement rétablis. Il est encore tôt pour connaître toutes les conséquences, mais nous avons actuellement le sentiment qu’un accord économique sera mis en place car c'est dans l’intérêt des deux parties. Notre plus grand « risque » actuel est le niveau des taux de change, comme nous rapportons en dollars US et avons des opérations importantes au Royaume-Uni. Nous suivons de près les évolutions réglementaires. Mais finalement, le Brexit aura sans doute peu d’impact sur les affaires, tant au niveau du marché de l’assurance de Londres que sur notre activité, et d’autant moins en France.
Vous avez récemment pris la vice-présidence de l’Apref. Quelle sera votre contribution ?
Cette nomination s’inscrit dans la volonté de Swiss Re de contribuer en tant que réassureur étranger à des réflexions de place sur les principaux sujets qui préoccupent le secteur. Nous sommes donc prêts à consacrer du temps pour ce dialogue avec les parties prenantes afin d’apporter ensemble des solutions. Le nouveau projet de loi sur la RC, l'introduction d'un préjudice écologique, le terrorisme ou encore la révision potentielle de Solvabilité II sont des sujets que nous suivons de près et qui suscitent des débats au sein de l’Apref.