interview de la semaine

« L’assurance cinéma commence tout juste à être rentable en France »

Publié le 15 juin 2017 à 8h00    Mis à jour le 15 juin 2017 à 10h56

Thierry Gouby

Olivier Héger, directeur général de Circles Group

Thierry Gouby
chef de rubrique

A la tête de l’un des principaux assureurs de risques spéciaux en Europe, Olivier Héger, directeur général de Circles Group, revient sur l’activité et les projets de la compagnie notamment en France.

Pouvez-vous nous présenter Circles Group en quelques mots ?

Après avoir débuté une carrière de courtier, j’ai créé Circles Group en 1989, une compagnie d’assurance dédiée aux risques du cinéma et de la publicité, en Belgique d’abord, en France ensuite. Désormais, Circles Group est actif dans 33 pays, grâce notamment à un réseau de courtiers spécialisés, une petite dizaine par zone avec un ou deux produits. Nous enregistrons un chiffre d’affaires qui varie entre 30 et 100 M€, avec une dizaine de produits disponibles (films, événements, équitation, Fine Art, risques politiques, Ticketing, etc.).

Le marché de l’assurance cinéma est-il rentable aujourd’hui en France ?

Il commence tout juste à l'être, mais il n’est pas encore le plus profitable. Il y a quelques années, les ratios S/P tournaient autour de 80 % pour le marché français. Aujourd’hui, ils sont tombés sous la barre des 70 % mais nous sommes encore loin des ratios espagnols à 25 %.

Le problème est culturel. En France, l’assurance est perçue comme un investissement sur lequel on attend un retour, c’est pour cela qu’elle est souvent « consommée », notamment dans la publicité. Entre les commissions et les budgets serrés, il y a une pression colossale sur les courtiers et certains n’hésitent pas à accepter n’importe quoi pour satisfaire leurs clients.

Pour tenter de revenir à des niveaux de rentabilité corrects, nous n’avons pas hésité à abandonner certaines couvertures, comme la garantie « weather day stop » qui est clairement déficitaire et parfois utilisée de manière abusive.

Quels sont les produits qui y fonctionnent le mieux ?

Sur l’ensemble des garanties que nous proposons, les produits dédiés au cinéma et à l’événementiel sont clairement ceux qui performent, ces derniers représentant près de 65 % de notre chiffre d’affaires dans l’Hexagone. Au Brésil, nous sommes par exemple leader sur le Fine Art alors qu’en Asie c’est notre produit Circle Asset, qui couvre les forts patrimoines, qui marche le mieux. Cela dépend du pays.

Comment gérez-vous les sinistres très médiatiques ?

Nous sommes un assureur reconnu pour sa technicité et sa connaissance pointue de l’assurance et des marchés sur lesquels nous évoluons. Cela signifie, entre autres, que nous ne nous laissons pas influencer par la médiatisation de certains sinistres.

Lors de l’annulation de la tournée de Johnny Halliday, ou lors du Dakar, certains assureurs généralistes ont indemnisé plus qu’il ne le fallait du fait d’un manque de technicité et de la médiatisation des sinistres. A contrario, nous avons une excellente réputation, car nous ne rechignons jamais à payer un sinistre qui est dû. Sauf si lors de la déclaration, il s’avère qu’on nous a menti ou caché des éléments indispensables à l’appréciation du risque.

Pour le reste, nous faisons confiance à la qualité de nos courtiers et à leur analyse professionnelle des risques qu’ils nous présentent, mais s'il s’avère qu’un producteur ou un organisateur manque d’éthique alors nous préférons stopper toute collaboration.

Vous venez de lancer une nouvelle offre dédiée à la billetterie. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit de la première assurance annulation sans exclusion de garantie. Lorsque vous dépensez 50 € pour la place d'un match de sport et que vous ne pouvez pas vous y rendre pour quelque raison que ce soit, les démarches pour se faire indemniser sont longues et fastidieuses, avec l’obligation de faire la preuve de la cause de l’annulation.

Notre nouvelle garantie Ticketing, lancée en ligne depuis le 28 avril sur les plates-formes Njuko et SportUp, permet tout simplement à l’acheteur, une fois son billet acheté et son assurance souscrite, d’être certain de pouvoir être indemnisé en cas d’impossibilité, grâce à un simple QR Code, et sans aucun justificatif.

Pour réussir à mettre en place cette garantie, il a évidemment fallu prendre en compte le risque de fraude, notamment pour ceux qui savent à l’avance qu’ils n’assisteront pas à la rencontre sportive. Le montant de cette assurance ticketing s’élève à 10 % du prix du billet. Pour l’heure, cette offre ne s’applique qu’aux événements sportifs de haut niveau (hors football), mais nous réfléchissons à l’étendre sur la billetterie de spectacle, avec la possibilité de redistribuer les billets annulés à ceux qui n’en ont pas eu. Si nous arrivons à mettre cela en place, le taux de l’assurance pourra alors diminuer. Enfin, pour ce qui est du football, nous réfléchissons à mettre en place une franchise sur le nombre de matchs minimum à voir, notamment lors d’achats d’abonnements, pour éviter que les spectateurs peu scrupuleux ne choisissent que les grandes affiches.

Quelles sont aujourd’hui vos relations avec vos réassureurs ?

Notre premier partenaire réassureur date de 1991 et il est toujours à nos côtés. Aujourd’hui, nous nous appuyons sur trois enseignes solides : HDI (groupe Talanx), XL Catlin, et Axa.

Fort de ces partenaires, nous sommes aujourd’hui capables d’aligner jusqu’à 50 M€ de capacités sans interroger le marché. C’est le cas pour le festival musical géant Tomorrowland (200 000 spectateurs). Nos réassureurs nous font confiance car depuis le début de notre activité notre croissance annuelle est à deux chiffres avec un loss ratio contenu, entre 40 et 55 %.

Souhaitez-vous faire des acquisitions dans les prochains mois ?

Nous avons mandaté une banque d’affaires pour nous aider à nous développer, plus particulièrement en Suisse où Circles souhaite s’implanter. Nous regardons les opportunités qui se présentent, notamment les agents souscripteurs locaux qui sont présents dans nos spécialités, même si la plupart font souvent une grosse part de leur activité dans les risques de particuliers.

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