Sylvaine Emery, directrice des activités internationales du groupe Humanis
chef de rubrique
Avec une activité à l’international en croissance, le groupe Humanis segmente ses offres, propose de nouveaux services et accélère sa digitalisation.
Que représente aujourd’hui l’activité internationale pour Humanis ?
Le groupe Humanis est le seul groupe de protection sociale à proposer via un guichet unique toute la protection sociale à la française (retraite, santé et prévoyance) au salarié qui s’expatrie dans un cadre collectif ou individuel. Pionnier en la matière, le groupe construit des solutions différenciantes qu’il assure et qu’il gère dans le respect des réglementations. Des assureurs et des mutuelles nous délèguent aussi leur gestion dans ces domaines. Cent quarante personnes travaillent dans cette direction dédiée. En retraite, les équipes de gestion sont basées essentiellement à Montreuil (Seine-Saint-Denis). En santé, notre centre de gestion expatriés « Welcare » se trouve à Blois (Loir-et-Cher). En retraite complémentaire, nous comptons 132 000 cotisants et en santé nous couvrons 25 000 personnes.
Le nombre d’expatriés français continue-t-il de croître ?
Depuis 1996, nous enregistrons chaque année une progression d’expatriés de l’ordre de 3 %. 100 000 personnes quittent chaque année le pays. La France, qui était en retard en la matière par rapport à ses voisins européens, anglais, néerlandais et allemands, commence à les rattraper ! Fin 2015, 1,7 million de nos compatriotes étaient inscrits au registre des Français établis hors de France.
Où partent-ils et quel est leur profil ?
L’expatriation se fait encore à 50 % en Europe, principalement en Suisse puis au Royaume-Uni et en Belgique. L’Amérique du Nord est la deuxième région d’expatriation (14 %) et les Etats Unis le deuxième pays d’expatriation. Viennent ensuite le Proche et Moyen-Orient (8,1 %) et l’Asie Océanie (8 %), puis l’Afrique francophone (7,3 %) et l’Afrique du Nord (6,5 %). Les tendances évoluent. Suisse, Etats-Unis, Algérie, Sénégal et Côte d’Ivoire progressent nettement en 2015. Les jeunes diplômés partent davantage. De plus en plus d’universités et de grandes écoles ont passé des contrats avec des établissements étrangers. Cela fait désormais partie des cursus.
Les expatriés sont par ailleurs nettement plus diplômés que la moyenne française, puisque 50 % ont un niveau de formation supérieur à bac +2.
Ces expatriés sont-ils bien couverts en santé, prévoyance et retraite ?
Je vous répondrai plutôt par l’affirmative lorsqu’ils sont envoyés par leur entreprise. C’est beaucoup moins le cas lorsqu’ils partent à titre individuel. D’après notre baromètre annuel de l’expatriation*, 17 % des expatriés déclarent ne pas être couverts en santé, et la proportion atteint 42 % en prévoyance et 49 % en retraite complémentaire. Pire encore, 54 % n’ont pas souscrit de garantie d’assistance rapatriement par exemple, en cas d’accident ou de maladie grave. Nous les sensibilisons pourtant à ces questions et les invitons à préparer leur départ. Nous proposons par exemple depuis cette année un entretien individuel retraite dédié aux expatriés. Notre objectif est avant tout de sécuriser entreprises comme particuliers. Nous constatons que ces efforts commencent à payer puisque le taux de préparation en matière de protection sociale progresse depuis deux ans de 9 % par an.
Comment se comportent les entreprises ?
Elles sont de plus en plus contraintes par les réglementations et les exigences de conformité (« compliance »). Elles doivent aussi maîtriser leurs coûts ; dans le même temps, elles veulent améliorer leur politique de rétention des talents tout en assurant une équité de traitement entre les salariés locaux et expatriés. Pas simple ! D’où l’établissement de différents packages segmentés selon les profils des salariés. Globalement, les packages sont moins généraux qu’auparavant. On assiste également au développement des missions et de nouvelles formes de « commuting », les salariés partant sans déplacer pour autant la famille, ce qui peut la fragiliser. Dans les entreprises qui ont un faible volume d’expatriés, le conseil et le contrat « tout en un » collectif ou individuel sont très utiles. Les multinationales, pour leur part, sont souvent bien structurées et créent pour certaines des filiales dédiées au personnel international, ce qu’on appelle des « global employment company ».
Le groupe Humanis a-t-il lancé de nouvelles offres ?
Nos équipes ont le souci de créer des solutions affinitaires standards et sur mesure. Nous avons ainsi développé une offre « Syntec » dédiée à la branche des bureaux d’études techniques. Nous avons récemment lancé une offre dédiée aux entrepreneurs et non salariés (le Pack Expat TNS). Quant à notre offre Pack Expat senior, elle double chaque année depuis son lancement.
En matière de digitalisation, à quel stade en êtes-vous ?
Nous sommes embarqués dans une transformation numérique permanente. Beaucoup d’applications (conseils et sécurité) sont déjà intégrées dans nos contrats santé. Les assurés peuvent consulter leurs remboursements en ligne 24h/24 et accéder à un réseau de dizaines de milliers de professionnels de santé. Tout comme les flux entre les mutuelles et la Sécurité sociale sont « noémisés », notre centre de gestion expatrié Welcare l’est avec la Caisse des Français de l’étranger (CFE), notre partenaire historique, ce qui assure une grande fluidité des flux de remboursement. Le défi permanent est de maintenir la compatibilité entre une digitalisation de plus en plus poussée et le champ réglementaire, notamment en matière de confidentialité des données médicales.
Etes-vous optimiste pour l’avenir ?
Oui, absolument, car nous pensons que le mouvement d’expatriation va se poursuivre. Notre volonté est de continuer à accompagner entreprises et particuliers. Et notre leitmotiv tient en deux mots : se préparer et anticiper !
* (source : baromètre Humanis – les expatriés et leur protection sociale en partenariat avec www.lepetitjournal.com)