Didier Arminjon et Didier Seigneur, président et vice-président de CRF asssurances
rédacteur en chef
Dressant le bilan de 2018, les dirigeants de CRF assurances passent en revue les objectifs pour l'année en cours et évoquent le contexte de souscription actuel.
Quelle est l’actualité de CRF en cette rentrée ?
Didier Arminjon : Le cabinet fête ses vingt ans d’existence. Au-delà du symbole, c’est pour nous significatif puisqu’avec le temps CRF a acquis une grosse légitimité sur ses spécialités des institutions financières, des FinTech, des incubateurs ou encore des BioTech.
Sur le plan opérationnel, 2018 a été une année de performance sur nos lignes de spécialités que sont la RC pro, la RC MS ou les garanties homme clé et perte d’emploi du dirigeant. Au total, nous avons bouclé l’exercice passé avec une croissance de l’activité de 12 % à 2,2 M€, un nombre de polices qui a progressé de 20 % et un new business en hausse de 26 %.
Et ce alors même que nous avons consacré une bonne partie de l’exercice à la conformité en général et à l’implémentation du RGPD puis de la DDA en particulier. Nous avons budgété une croissance comparable pour 2019 et pour l’instant nous sommes en phase avec cet objectif.
Quel est le modèle d’affaires de CRF assurances ?
Notre business model repose sur deux marchés de spécialités : d’une part les institutions financières et d’autres part les start-up. Ce sont les deux moteurs sur lesquels s’appuie notre développement.
Sur notre premier segment de marché, nous devons être techniques et professionnels pour répondre au mieux aux besoins pointus de nos clients institutions financières. Sans qu’il s’agisse des principaux établissements de crédit de la place, le niveau de réactivité et de technicité attendu par les sociétés d’asset management ou de private equity avec lesquelles nous travaillons place la barre très haut.
Notre enjeu est donc celui de la compétence de nos équipes car nous sommes face sur ce segment de marché à des courtiers de taille mondiale (Marsh, S2H, etc.) et même si nous ne cessons de recruter (avec tout récemment l’arrivée d’une directrice juridique et DPO) notre staff ne compte qu’une quinzaine de personnes.
Sur notre second marché, celui des start-up, la donne est différente. D’abord parce que ce sont des jeunes pousses que nous accompagnons dans leur montée en puissance sur des horizons de dix-huit à vingt-quatre mois. Ces toutes jeunes entreprises ne se préoccupent pas beaucoup d’assurance dans les premiers temps ; mais si un fonds d’investissement se propose de les financer, une solution assurantielle doit très vite leur permettre de répondre à une telle sollicitation. Notre enjeu est alors d’être réactif et au fait des problématiques qui leur sont propres. Les risques sont davantage standardisés que pour les institutions financières. Les outils technologiques et industriels font la différence. CRF a développé pendant un an l’implémentation de sa solution logicielle Smart’Start online qui nous positionne d’autant mieux qu’elle offre, outre la réactivité propre à la souscription et la gestion en ligne des assurances de l’entreprise, la possibilité de revenir au sur-mesure si les risques de la start-up l’exigent.
Nos concurrents ne sont pas les mêmes qu’auprès des institutions financières. Nous trouvons face à nous des petits cabinets qui misent, comme CRF, sur leur proximité et leur capacité à accompagner le client mais aussi les courtiers grossistes à l’instar du principal d’entre eux, April.
Quel est le contexte de souscription chez les assureurs ?
Didier Seigneur : Tout est fonction des risques dont on parle ; même sur nos spécialités des lignes financières, les politiques de souscription divergent. Ainsi de Berkshire Hathaway qui vient d’investir le marché français quand les tenants du marché ont pour certains enregistré des pertes en 2018 sur ce segment et lèvent le pied en termes de souscription.
Dans le même sens, le rapprochement d’Axa XL suscite encore des interrogations alors que Chubb constitue une vraie alternative sur les entreprises de taille intermédiaire (ETI).
Globalement, ce que je constate, c’est la grande peur de l’IPO aux Etats-Unis ; en cas de cotation nord-américaine, 6 ou 7 compagnies se positionnaient encore il y a un an, aujourd’hui si deux assureurs vous répondent vous pouvez vous estimer heureux.
En matière de cyber, le marché français a enregistré des sinistres conséquents ces douze derniers mois alors même que le niveau de primes restait faible. Si vous ajoutez à cela la composante systémique du risque cyber, encore mal appréhendée, l’appétit des assureurs pourrait rapidement se transformer en indigestion.
Avec quelles compagnies travaillez-vous ?
D.S. : Au total, CRF travaille avec quinze assureurs pour toutes ses spécialités. Par exemple, nous sortons actuellement une garantie propriété intellectuelle en partenariat avec Tokio Marine HCC. Historiquement, ce marché est traité à Londres mais l’assureur a identifié le besoin d’un texte français et d’une équipe à même de garantir brevets et autres actifs immatériels.
D.A. : Nous travaillons avec tous les assureurs dès lors que nous avons des relations avec la direction générale et accès aux opérationnels, au département sinistre et à la souscription. Ce sont pour nous quatre points indépassables pour travailler dans de bonnes conditions avec les preneurs de risques.
Quel est votre plan de marche pour les prochains mois ?
D.A. : Nous sommes à mi-parcours de notre LBO qui s’étale sur sept ans, la priorité reste donc de rembourser la dette contractée. Notre autre enjeu prioritaire relève des ressources humaines ; CRF mise beaucoup sur ses équipes dans un contexte où les compétences clés sont rares et il nous faut retenir les collaborateurs en les formant, en les faisant grandir et en leur proposant des évolutions de carrière.
Notre légitimité sur nos domaines de spécialité étant acquise, notre objectif est maintenant de continuer à nous développer tout en monitorant de très près la répartition de nos risques entre assureurs, ainsi que l’équilibre en volume de nos deux marchés et de nos lignes d’assurance.