L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a publié son rapport concernant les avancées des assureurs français sur le risque de changement climatique. Les outils et méthodes développés par les organismes restent trop hétérogènes selon le régulateur.
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Le 10 avril dernier, l’ACPR a rendu public son rapport sur « les assureurs français face au risque de changement climatique ». Le régulateur constate que si les assureurs font mieux que les banquiers, les avancées sont hétérogènes selon leur taille. Les grandes entreprises sont bien avancées sur le sujet, en revanche les petites mutuelles peuvent mieux faire. Ainsi, l’ACPR demande à l’ensemble du secteur d’aller plus loin dans sa façon d’appréhender le risque climat tant à l’actif qu’au passif. « Si la définition du risque de changement climatique fait l’objet d’un consensus large, les outils et méthodes développés par les organismes restent très hétérogènes et sont appelés à évoluer dans les années à venir. La déclinaison du risque de changement climatique en risque physique, risque de transition et risque de responsabilité renvoie à des risques connus des assureurs qui peuvent s’appuyer sur des outils et des procédures de gestion des risques déjà en place. Pour autant, les multiples dimensions du changement climatique imposent de nouvelles adaptations », écrit l’ACPR dans la présentation du rapport.
Vaste champ d’exploration
Cependant, les assureurs restent circonspects face au texte. « Côté passif, ce document nous renvoie à un champ d’exploration extrêmement vaste que l’on essaie d’investiguer étape par étape, avec pragmatisme », explique Jean-Louis Charluteau, directeur des risques naturels et de la réassurance chez Generali France. « En ce qui concerne l’actif, ce rapport donne le sentiment que les assureurs auraient fait ou feraient une sorte d’impasse sur un des enjeux les plus matériels pour le secteur. Aujourd’hui, ne pas s’intéresser au changement climatique n’est juste plus possible. Cela relèverait, plus que de la faute professionnelle, de l’inconscience. Nous assureurs sommes très conscients de la nécessité d’inclure sur cet enjeu historique l’ensemble de nos pratiques professionnelles, remarque François Garreau, responsable de la mission RSE chez Generali France. Il y a clairement une prise de conscience au niveau des états-majors. Nous avons une problématique de mise en avant des ressources et d’activation sur des bases méthodologiques et scientifiques robustes. » Selon le régulateur, les assureurs doivent définir de façon plus précise leur stratégie en matière de gestion du risque de changement climatique et ne pas la limiter à la seule politique RSE, notamment dans le choix des scénarios. Sur ce point, François Garreau indique : « Nous attendons des recommandations de la part de l’ACPR, du moins des propositions concernant le choix de scénario, ainsi que des règles concrètes permettant de la comparabilité. Cela nous permettrait d’avoir un fil directeur clair pour nous positionner et savoir si nous sommes dans ou au-dessus des 1,5°C. »
Par ailleurs, le rapporteur attend des assureurs qu’ils utilisent des métriques autres que l’empreinte carbone qu’il considère comme « tournée vers le passé ». Jean-Louis Charluteau et François Garreau indiquent que des travaux sont menés au sein de la Fédération française de l’assurance. Par ailleurs, « nous travaillons en interne et en partenariats sur de nouvelles métriques, de nouveaux indices tant pour l’actif, pour le passif, que pour les prévisions sur l’empreinte carbone, les historiques, les scénarios, les fonds verts, la décarbonation réelle… » Ils regrettent que le rapport n’apporte pas plus de recommandations concrètes. « En tant que directeur des risques naturels et de la réassurance, ce rapport, s’il confirme bien la nécessité d’investir dans ces travaux, ne donne pas spécialement de pistes nouvelles à explorer ou d’orientations opérationnelles dont s’inspirer », conclut Jean-Louis Charluteau.