Trois ans après son entrée sur le marché brésilien, Axa est en avance sur son plan de développement. Philippe Jouvelot, directeur général de la filiale brésilienne, fait le point sur l’activité et les perspectives de l'assureur dans le pays.

Comment se porte l’activité d’Axa aujourd’hui au Brésil ?

Nous avons longuement étudié le marché brésilien, notamment les structures de coût et de distribution, ou encore les attentes des clients. Après ces études, il y a de bonnes surprises. D’abord, le potentiel de ce pays est gigantesque et nous avons aujourd’hui de l’avance sur notre ambitieux plan de développement commercial. Nous voulons surtout une croissance rentable. Pour nous adapter à la taille de ce marché hors norme, Axa aura ouvert d’ici la fin d’année une dizaine de succursales à travers les différentes provinces du pays pour répondre aux besoins des clients.

A contrario, même si le pays connaît une certaine stabilité réglementaire et juridique avec des régulateurs sérieux, les Brésiliens sont peu familiers avec l’assurance. C’est un produit qu’il nous faut à la fois vendre et expliquer. Il faut des couvertures simples et rentables à commercialiser auprès de segments bien identifiés.

Quelles branches tirent votre activité ?

Axa au Brésil est essentiellement positionné sur l’assurance et l’assistance. Sur la partie assurantielle, nos activités se répartissent également entre assurance affinitaire, assurance vie, assurance des entreprises (TPE, PME…) et grands risques. D’autres branches vont suivre.

Nous enregistrons un très bon développement, mais nous sommes surtout soucieux de la qualité de nos risques et de nos résultats techniques. Aujourd’hui, nous n’acceptons que 15 % des affaires qui nous sont soumises. Par exemple, sur les entreprises de plus de cinquante salariés, nous enregistrons près de 4 000 demandes de tarification par mois.

Nous sommes aussi très attentifs à la santé, où les produits d’assurance simples (« primary care ») représentent un marché gigantesque avec seulement 50 millions de consommateurs couverts pour 205 millions de clients potentiels : les perspectives sont incroyables. De son côté, le marché automobile brésilien est en pleine mutation, notamment digitale, et les intermédiaires vont devoir s’adapter à l’« ubérisation » de ce segment dans les années qui viennent. Axa sera l’un des acteurs actifs dans cette transformation digitale.

Quid du marché IARD et des grands risques ?

L’activité IARD est le troisième segment de ce marché de l’assurance brésilien de 100 Md$, soit 3,9 % du PIB du pays, contre 9,3 % pour la France. La dynamique est telle que même avec une croissance du PIB négative, le taux de croissance du marché de l’assurance est en hausse de 10 % cette année. Dans ce contexte, notre activité grands risques fonctionne très bien tant en collectives qu’en non vie, et représente un tiers de nos revenus dans le pays, en avance sur notre plan de développement.

Ceci étant, sur les grands comptes, il est encore difficile d’être apériteur car il nous manque de la notoriété auprès des courtiers. Nous sommes donc plutôt dans un schéma de co-assurance, sauf pour certaines filiales de grands groupes européens installées ici. Nous pensons pouvoir remporter des contrats avec de grandes entreprises brésiliennes dès l’année prochaine en tant qu’apériteur. Il faut pour cela veiller à la qualité du service et à la qualité de nos résultats techniques, garanties de notre développement durable.

Après l’acquisition de SulAmérica Companhia de Seguros Gerais l’année dernière, souhaitez-vous encore faire des opérations de croissance externe ?

Nous n’avons pas besoin d’opérations deM&Apour poursuivre notre développement et notre plan stratégique ne le prévoit pas. Le marché brésilien compte actuellement 125 compagnies d’assurance IARD et 1 500 opérateurs en santé. C’est un marché en consolidation, essentiellement constitué d’entreprises familiales aujourd’hui confrontées à des règles de solvabilité et des exigences en fonds propres réévaluées. Comme la plupart des actionnariats familiaux brésiliens ne souhaitent pas ouvrir leur capital, ils sont parfois obligés de vendre et par conséquent de nombreux regroupements restent à venir.

Quels sont aujourd’hui vos réseaux de distribution privilégiés ? Quid du courtage ?

Il y a pas moins de 70 000 courtiers au Brésil, auxquels il faut ajouter 20 000 intermédiaires occasionnels. Nous avons des relations très proches avec nos courtiers. Actuellement, Axa au Brésil compte 2 700 agents et entre 400 et 500 courtiers. Si les dix plus grands cabinets du pays sont dédiés aux grands risques, les petits courtiers de proximité se concentrent généralement sur la vente de produits d’une seule compagnie. Notre enjeu est d’avoir une offre multilignes pour garder ces intermédiaires et accompagner leur développement.

Regardez-vous d’autres pays d’Amérique latine ?

Le groupe Axa est actuellement présent dans une trentaine de pays émergents, dont trois en Amérique latine (Brésil, Mexique et Colombie). Le Brésil n’a pas de leadership sur les deux autres pays et le groupe a une position très forte, au Mexique notamment. De manière générale, nous avons deux axes de développement forts sur les marchés émergents : la qualité de portefeuille, avec un focus particulier sur la croissance du résultat, et l’intégration du digital dans nos activités.