Outre la généralisation de la complémentaire, la promotion de fonds en euros diversifiés constitue le deuxième grand sujet d'actualité de la fédération en ce début d'année.
Quel regard portez-vous sur la généralisation de la complémentaire santé prévue par l'accord interprofessionnel signé le 11 janvier ?
Nous savions que les partenaires sociaux auraient des réflexions sur la portabilité des droits, mais le fait que la généralisation de la complémentaire santé collective se soit invitée au débat pour finir au premier article de l'accord constitue une surprise. Cela montre que la complémentaire est aujourd'hui un bien très précieux pour les Français et non plus seulement un accessoire à l'Assurance maladie. Je vous rappelle que 94 % de la population bénéficie aujourd'hui d'une couverture complémentaire. Et 59 % des salariés sont d'ores et déjà couverts par l'intermédiaire d'un régime collectif.
Quel sera l'impact de cette décision au moment de sa mise en œuvre prévue pour 2016 ?
Cet accord va transformer en profondeur le marché avec un basculement d'une partie de l'assurance individuelle vers des régimes collectifs. Cette situation va amener les sociétés positionnées uniquement sur l'assurance individuelle à se convertir au marché des collectives, notamment sur le segment des TPE/PME. Parallèlement, bon nombre d'acteurs vont revoir leurs offres. Au-delà de ces changements, cet accord est porteur d'un principe extrêmement fort : celui de la concurrence et du libre choix laissé à toute entreprise de son assureur santé.
Cet accord signe-t-il la fin des clauses de désignation, tant décriées ?
En santé oui, même si les clauses déjà en place iront à leur terme. La concurrence jouera désormais à plein au profit de l'assuré. Un nouveau marché est donc à construire. Nous allons en effet assister à une reconfiguration profonde du segment de la complémentaire. Et, comme vous le savez, d'autres évolutions pourraient intervenir dans la mesure où le gouvernement a annoncé son intention d'organiser, en 2013, une grande concertation sur le rôle de la complémentaire santé. Même si, pour l'heure, nous ne connaissons ni le contenu, ni le timing de ces échanges, la FFSA y participera activement, dans le cadre de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (Unocam).
Justement, quelle est votre position sur la refonte du contrat solidaire et responsable à l'heure où certains de vos adhérents sortent, même partiellement, du dispositif ?
Nous sommes tout à fait disposés à faire évoluer les dispositifs existants s'il s'agit de promouvoir des politiques concertées de gestion du risque et de maîtrise des dépenses entre Assurance maladie et complémentaires. Il ne faut en revanche absolument pas, comme c'est déjà arrivé, que sous couvert de redéfinir le cadre des contrats solidaires et responsables, de nouveaux transferts de charges incombent de manière obligatoire aux complémentaires. Ce serait une solution de facilité pour l'Etat qui inévitablement amènerait les organismes complémentaires d'assurance à réévaluer leurs tarifs. La complémentaire santé constitue déjà pour les Français le principal budget d'assurance.
Sur le plan des résultats, quel bilan dressez-vous de l'exercice 2012 en assurance de personnes ?
La branche santé et accidents se porte bien avec une croissance de l'ordre de 5 % à 18 Md€. En assurance vie, le chiffre d'affaires s'élève à 114 Md€, en recul de 8 % par rapport à 2011. Fait marquant, pour la première fois, la collecte nette annuelle est négative de 3,4 Md€. Quand, dans le même temps, la collecte des livrets réglementés a atteint un niveau historique de 49,17 Md€. C'est une situation jamais vue jusqu'à maintenant, qui montre une préférence inédite des Français pour les placements liquides.
Dans ce contexte, quelles sont les perspectives pour l'assurance vie ?
Nous constatons que l'épargne longue devient difficile à capter. Plus que jamais, il est donc impératif de recréer un climat de confiance pour les épargnants en ne touchant pas à la fiscalité de l'assurance vie. Dans le climat d'incertitude ambiant, toute modification est susceptible de déstabiliser les encours d'assurance vie. Or, l'assurance vie est un moteur essentiel du financement de l'économie. En 2012, ce sont 56 % des actifs des assureurs qui ont été orientés vers les entreprises soit, pour la première fois, plus de 1 000 Md€ mobilisés pour le financement de l'économie.
Que proposez-vous ?
Comme vous l'avez compris, le levier fiscal ne doit pas être utilisé. Mais, heureusement, il n'est pas le seul qui permette d'atteindre les objectifs, partagés par les assureurs et les pouvoirs publics, de développement de l'épargne longue et d'orientation de cette épargne vers le financement de l'économie. Nous préconisons de pouvoir introduire dans les contrats multisupport des fonds en euros diversifiés qui offrent des garanties sur le capital moins contraignantes que les fonds en euros. C'est la proposition que nous avons formulée aux députés Karine Berger et Dominique Lefebvre dans le cadre de leur rapport sur l'épargne longue. Aujourd'hui, les épargnants n'ont le choix qu'entre les fonds euros, qui présentent une garantie du capital à tout instant mais dont le rendement moyen est proche de 3 %, et les fonds en unités de compte, qui offrent des potentiels de rentabilité plus attrayants (+ 13 % en 2012 par exemple), mais dans lesquels la totalité du risque est portée par l'épargnant. L'euro diversifé est intermédiaire entre ces deux univers - le capital n'est garanti qu'à partir d'un certain horizon -, ce qui permet, en contrepartie, d'offrir une espérance de rentabilité plus élevée que sur un fonds euros.
Quels sont les autres intérêts de ce produit ?
En desserrant les contraintes de garantie du capital, l'euro diversifié permet aux assureurs des allocations en actifs risqués plus importantes, ce qui est bénéfique pour le financement de l'économie et va dans le sens des objectifs des pouvoirs publics. A titre d'illustration, si 30 % des fonds euros diversifiés sont investis en actions et que 15 à 30 % des encours actuels des fonds euros basculent dans ce support, ce sont de 40 à 80 Md€ de plus qui seront investis en actions.
Quel est le bilan 2012 des assurances de biens et de responsabilités ?
La branche sort en croissance en 2012 (+ 4 %) dans la droite ligne de 2011. Cette progression est plus forte chez les particuliers (+ 4,2 %) que pour les professionnels (+ 3,5 %) et s'explique au moins pour moitié par les majorations tarifaires de rattrapage intervenues en 2012. L'ensemble des segments Iard sont en croissance à l'exception notable de la construction, en repli de 1 %. Le rythme atone des mises en chantier laisse à penser que cette contraction des revenus de l'assurance construction se poursuivra cette année.
Et comment a évolué la sinistralité ?
Elle s'est globalement dégradée de 4 % l'an dernier, à 35 Md€. En multirisque habitation, le ratio combiné se dégrade de sept points, à 106 %. L'assurance auto enregistre une baisse de la fréquence et gagne un point de ratio combiné à 102 % en dépit d'un coût moyen qui s'inscrit à la hausse.
Après la période électorale, les réformes comme celle du régime Cat nat' sont-elles à nouveau inscrites au calendrier ?
Il n'y a pas encore de calendrier précis. Mais la réforme du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, dont le projet de texte fait consensus, pourrait bien intervenir dès 2013.
2013 sera aussi une année cruciale pour Solvabilité II. Qu'attendez-vous de l'étude d'impact sur les branches longues qui vient d'être lancée ?
Solvabilité II est en effet un des dossiers importants de l'année. Les modalités de l'étude d'impact, qui a commencé le 28 janvier, sont conformes aux demandes du marché. Cette étude d'impact doit permettre d'évaluer l'ampleur du problème de volatilité et de procyclicité que présente aujourd'hui la directive, et d'apprécier l'efficacité des mesures contracycliques proposées par la profession. Cette étude doit durer neuf semaines. Ses résultats seront publiés début juin, en vue de la reprise des négociations sur la directive Omnibus 2 en juillet.