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«Nous souhaitions que Tégo se fasse avec Unéo»

Publié le 10 mars 2016 à 8h00    Mis à jour le 14 mars 2016 à 14h32

thierry gouby

Patrice Paulet, PDG de l’AGPM

thierry gouby
journaliste

Moins de six mois après son arrivée à la tête de l’AGPM, Patrice Paulet fait le point sur l’activité de la mutuelle d’assurance du secteur de la défense et de la sécurité. Le PDG du spécialiste de la prévoyance militaire revient également sur les rapprochements en cours et sur le contexte réglementaire.

Comment s’est passé l’exercice 2015 pour l’AGPM ?

Nous attendons les résultats définitifs mais, globalement, 2015 a été une bonne année. Si nous nous référons à 2014, nous avons réalisé un chiffre d’affaires d’environ 487 M€ pour un résultat net de 30,6 M€. Nous comptons 755 000 adhérents pour 1,7 million de contrats en portefeuille.

En ce qui concerne notre activité prévoyance/vie/épargne, notre chiffre d’affaires atteint 340 M€. En IARD, même si nos portefeuilles auto (150 000 contrats) et habitation (320 000 contrats) sont modestes, nous avons bénéficié d’une sinistralité qui n’a pas été excessive et notre CA atteint 130 M€.

Notre ratio de solvabilité en 2014 a atteint cinq fois le minimum requis sous Solvabilité I. AGPM est une société en bonne santé, qui a les moyens de poursuivre son plan stratégique. Nous sommes bien implantés dans notre cœur de métier et nos résultats nous permettent d’envisager l’avenir sereinement.

Justement, comment envisagez-vous l’année 2016 ?

Le vrai enjeu pour l’AGPM, qui évolue désormais à travers une niche restreinte, est de s’étendre vers des cibles adjacentes. La prévoyance reste notre cœur de métier mais aussi le cœur du réacteur en termes d’équilibre économique de l’entreprise. Désormais, nous devons développer la fidélisation des clients que l’on acquiert, pour ensuite les multi-équiper. Aujourd’hui, notre sociétariat est en moyenne équipé de 2,2 contrats, nous visons les 3 contrats pour 2017.

Avez-vous défini des axes stratégiques pour favoriser le multi-équipement ?

Notre premier axe est basé sur l’efficacité opérationnelle et la compétitivité. Il faut d’abord que l’on cherche à baisser les taux de chargement, un enjeu majeur pour toutes les mutuelles. On s’y applique et nous devons être compétitifs vis-à-vis de la concurrence.

Le milieu sécurité/défense est perçu comme une niche impénétrable, mais c’est aujourd’hui une bulle perméable et cela va s’accélérer. Nous ne sommes plus sur un segment captif et, en IARD par exemple, nous subissons la concurrence extérieure.

Notre deuxième axe concerne la satisfaction client, tant en termes de services que de produits : proposer les meilleurs prix, permettre une souscription facile avec une qualité et une rapidité de traitement des sinistres. Nous devons également aller chercher d’autres parts de marché qui ne sont plus uniquement dans le secteur de la défense.

Ainsi, le troisième axe concerne l’acquisition de nouvelles cibles, notamment en prévoyance collective. De nombreux organismes ou sociétés prennent les mêmes risques que notre sociétariat historique sans être identifiés comme tels. Ce sont des cibles avec des valeurs et des expériences proches des nôtres et que nous devons séduire.

Comment vous faites-vous connaître en dehors de votre cœur de cible ?

Au-delà des frontières sécurité/défense, nous fonctionnons sur la base de relations et de synergies avec des populations similaires. Nous venons par exemple de passer un partenariat avec l’Union fédérale autonome pénitentiaire. Nous sommes évidemment ouverts à l’ensemble du monde civil, via nos agences et délégués, mais nous sommes conscients que « monsieur tout le monde » ne vient pas voir l’AGPM naturellement.

Nous comptons sur le cercle rapproché de nos adhérents, qu’ils se fassent les ambassadeurs de nos offres auprès de leurs proches, de leurs familles, des retraités ou des anciens combattants par exemple. C’est cela qui crée l’élargissement de notre socle de sociétaires en milieu civil.

Envisagez-vous de travailler avec le courtage ?

Pour l’instant, nous ne travaillons pas ou peu avec le courtage. C’est une solution que nous envisageons très sérieusement, mais il faut également que les systèmes informatiques des deux parties puissent se parler. Nous ne sommes pas encore structurés pour le faire, mais c’est clairement le sujet des mois à venir.

Ceci étant dit, nous avons aussi un réseau de délégués (une centaine de conseillers mobiles et 125 conseillers dans les 45 agences réparties entre métropole et outre-mer). Nous avons également un centre de contacts vente par téléphone au niveau du siège ; pour une structure comme la nôtre, ne pas nous engager dans une démarche multicanal structurée serait une erreur. Nous avons aujourd’hui une sorte de dispositif en poignée d’éventail intégrant le canal Internet, qui nous permet de capter de nouveaux adhérents.

Envisagez-vous des rapprochements dans les prochains mois ?

Outre les partenariats noués historiquement avec d’autres mutuelles, nous avons entamé une démarche dans ce sens avec la création de la fédération Tégo. Nous sommes partis du principe que l’on n’échapperait pas à la dynamique globale de transformation du secteur. Notre petite niche étant perméable, les enjeux institutionnels nécessitaient que nous parlions d’une même voix.

Nous avons donc lancé cette fédération avec le GMPA et nous souhaitons parler d’égal à égal, échanger, créer des synergies, avec un partage de valeurs. Cette fédération laisse ses membres libres tout en construisant un grand pôle social de la défense/sécurité. Bien évidemment, nous souhaitions que cela se fasse à trois, avec Unéo, qui est l’acteur santé de référence sur notre marché. Pour des raisons qui sont les leurs, cela ne s’est pas fait et je le regrette.

Avec le GMPA, nous avons alors considéré que l’on pouvait poursuivre le projet Tégo, même à deux, avec pour esprit de créer un pôle d’adhésion qui fédère les acteurs de bonne volonté, même concurrents. Depuis, la MAA a rejoint la fédération et d’autres mutuelles sont en cours de discussion pour le faire.

Quoi qu’il arrive, la fédération Tego reste ouverte à d’autres acteurs de la communauté de la défense et de la sécurité, armés de la même volonté d’agir pour protéger ces populations.

Justement que vous inspire le rapprochement entre Unéo et Covéa ?

C’est un choix que je respecte. Il n’est pas surprenant que Covéa, par héritage de la GMF, ait été candidat pour un partenariat de ce type. Assurant historiquement des fonctionnaires, on retrouve une certaine cohérence.

Cependant, nous en sommes aux fiançailles et ce mariage doit être validé par une AGE. Si ce partenariat se fait, une UGM serait créée, constituant de fait un pôle sécurité/défense avec Unéo, MGP et GMF, visant à proposer une offre assurantielle complète. Cela renforcerait évidemment la compétition, mais nous avons aussi nos forces et un modèle économique solide.

Où en êtes-vous avec Solvabilité II ?

Nous avons essayé de faire d’une contrainte une opportunité pour ne pas subir les choses. Cette montée en puissance de la directive a été anticipée dès la fin 2010, notamment pour nous permettre de structurer notre stratégie par le biais de l’appétence au risque.

Cela va par exemple bouleverser notre politique de réassurance. Quels risques sommes-nous prêts à prendre sur nos fonds propres ? Jusqu’à quelle hauteur sommes-nous prêts à rogner notre bilan annuel ? C’est le cœur du sujet. Solvabilité II est certes un dispositif contraignant, mais nous sommes d'ores et déjà prêts concernant la question des dirigeants effectifs et des politiques écrites.

Le vrai enjeu est désormais de tirer les enseignements de la création d’un groupe prudentiel, quitte à adapter nos différentes entités. Nous sommes partis d’une association fondée après la guerre d’Indochine pour arriver aujourd’hui à deux sociétés d’assurance mutuelle. Solvabilité II va conduire à modifier la structure de notre groupe pour en faire un groupe prudentiel pour lequel il faudra garder notre fort héritage culturel.

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