Le directeurgénéral de Liberty en France, Olivier Muraire, fait le tour de la richeactualité de l’assureur grands risques, tandis que le patron du départementrisques politiques, Alexandre Egnell, revient sur l’été très chaud de cesegment de marché.
Quels sontles résultats de Liberty International Underwriters depuis le début del’année ?
OlivierMuraire : Après un début d’exercice difficile, nous sommes à nouveauen phase avec nos objectifs arrêtés pour 2014 avec une croissance de 15 % de nosrevenus, hors programmes affinitaires. Depuis 10 ans que Liberty est actif surle marché français, nous avons rempli les objectifs que nous nous étions fixés.Jusqu’en 2008, Liberty ne souscrivait que sur des niches très spécialisées. C’està cette époque que nous avons commencé à ouvrir de nouveaux départements touten recrutant des collaborateurs à même de les faire vivre. Résultat, notrechiffre d’affaires a cru en conséquence pour atteindre 120 M€ en 2013. Etdepuis l’ouverture, voilà un an, du département dommages à tous les risques,nous ambitionnons de devenir un spécialiste reconnu du risque d’entreprise.Pour cela, nous allons continuer à investir et recruter en conséquence. Pourl’heure, notre département d’origine, celui des risques financiers, pèse encorepour 40 % de l’activité totale. Et grâce à un bon développement, nous sommesaujourd’hui dans le trio de tête des acteurs du marché français. C’est aussi laconséquence du retrait de plusieurs assureurs des institutions financières quin’avaient pas vu venir, comme d’ailleurs l’ensemble du marché, les cumulsfaramineux entre RC pro et RCMS et certains risques systémiques, révélés augrand jour à l’occasion de la crise financière de 2008.
Quel bilandressez-vous de l’ouverture de la branche dommages après un an ?
OlivierMuraire : Liberty s’est positionné à l’automne 2013 sur la branchedommages toutes entreprises ; c’est le gros du marché des risquesd’entreprises (hors auto) avec, peu ou prou, 50 % des primes acquises par ce segment. L’accueil du marché a été vraiment favorable etnous venons d’enclencher deux recrutements pour faire face au flux d’affairesnouvelles et au développement de ce nouveau portefeuille.
Et sur leplan de la sinistralité ?
OlivierMuraire : La sévère sinistralité du premier semestre, la grêlenotamment, nous a largement épargné : Liberty déplore seulement un sinistre sur un site industriel quenous couvrons en dommages. Pour le reste, les résultats sont coformes à nos prévisions, mais lesvolumes sont encore trop faibles pour disposer d’une vérité statistique.
Quellessont vos ambitions avec l’opération de rapprochement de vos activitéseuropéenne en cours à Londres ?
OlivierMuraire : Le rapprochement du syndicat des Lloyd’s - Liberty Syndicate- et de la compagnie Liberty Mutual Insurance Europe est en cours. Son objectif ?Faire jouer différentes synergies et mettre en place une seule plate-forme desouscription avec désormais une marque commerciale unique pour l’Europe :Liberty Specialty Markets. Pour nous, en Europe continentale, cela signifieplus de capacités disponibles sur les risques maritime et terrorisme. Celasignifie aussi plus de spécialités pratiquées par Liberty en France : lesyndicat, par exemple, est un preneur de risque du transport de fonds et devaleurs et de l’assurance des œuvres d’art ; une ligne supplémentaire quenous pouvons proposer à nos clients. Pour autant, Liberty reste en France unepetite structure axée sur la réactivité et la qualité de services aux clients.Notre politique de souscription tient bien évidemment compte de cet état defait. Pour préserver ces caractéristiques, nous ne souscrivons pas des affairesqui nous amèneraient une importante sinistralité de fréquence lourde à gérer,car nous ne sommes pas encore équipés pour.
Alexandre Egnell,vous êtes responsable souscription crédit et risques politiques pour Liberty. L’actualitésemble se précipiter sur cette branche…
AlexandreEgnelle : Absolument ! Liberty a ouvert son département crédit& risque politique en septembre 2010. Depuis, le moins que l’on puissedire, c’est que les nombreux événements de ces dernières années ont mis en lumièrele besoin grandissant de protection par le marché privé de ce type de risquesexogènes, notamment sur les marchés émergents. Cette succession d’événementsmajeurs, des Printemps arabes à la guerre civile libyenne en passant par les conflitsau Mali, en Syrie, en Ukraine, ou encore les nationalisations sud-américaines,a mis en lumière le besoin de couverture d’assurance pour les entreprises dansun contexte d’économie globalisée. Le département de Liberty a donc ouvert sesportes au bon moment. Même si nous devons opérer une sélection appropriée desrisques qui nous sont présentés, le contexte est très porteur et le risquepolitique est devenu une préoccupation grandissante pour les entreprises tournéesvers les marchés émergents.
Quelle a été la zonela plus problématique pour les entreprises françaises et européennes ?
AlexandreEgnelle : C’est sans doute la Libye qui a été le plus touchée enmatière de risque politique. Avec, sur la partie contrats, des interruptionspour force majeure sans reprises avant les six mois prévus par nos contrats. Etles problèmes existent toujours tant en termes de sécurité sur place que debarrière administrative faute d’un Etat digne de ce nom dans le paysaujourd’hui. Les entreprises françaises sont, pour des raisons historiques,très exposées en Afrique du Nord. Et ce, aussi bien en Algérie, qu’au Maroc, enTunisie, en Libye ou en Egypte. Nos couvertures accordées depuis Paris pour lecompte d’entreprises françaises actives à l’international concernentmajoritairement des risques situés au Moyen-Orient et en Afrique.
Quid du conflit quioppose l'Ukraine à la Russie ?
AlexandreEgnelle : Là encore, les conséquences sont majeures. Les événementsconcernent deux pays où l’activité économique est bien développée et où leséchanges avec l’Europe sont nombreux. Devant le risque de guerre etl’incertitude de la situation, on ne prend plus de contrats en Ukraineactuellement. En Russie, l’incertitude est telle que l’on va sérieusements’interroger et le plus souvent refuser de garantir un nouveau projet sur leterritoire russe. Comme en Argentine d’ailleurs, sauf à disposer d’un contratde durée souscrit il y a plusieurs mois. Aujourd’hui, l’environnement estaujourd’hui trop tendu pour que nous puissions accompagner un assuré dans l’unde ces pays. D’où la nécessité de solliciter ces couvertures non-annulables enamont !
Pourquoi l’Argentine?
AlexandreEgnelle : Il ne vous a pas échappé que le pays vient de faire défaut.Et comme en 2001, nous n’avons pas la moindre idée de ce qu’il adviendra dansles prochains mois. Déjà, le gouvernement en place a pris des mesures derestrictions pour la sortie de devises. C’est très préoccupant et c’est unrisque, celui du contrôle des changes, qui monte en flèche actuellement.
Y-a-t-il des zonesgéographiques pour lesquelles les demandes de couvertures se développent ?
AlexandreEgnelle : Nous avons aujourd’hui beaucoup plus de demandes surl’Europe du Sud. Qui aurait pu imaginer cela il y a encore cinq ans ? Desdemandes d’assurance sur des pays frontaliers de la France, avec une monnaiecommune et, qui plus est, sont membres historiques de l’Union européenne. Denombreuses interrogations se font jour actuellement sur la Chine, notamment surle shadow banking, qui a irriguél’immobilier ces dernières années, et sur lequel nombre d’établissementsbancaires du pays sont exposés. Enfin, la volatilité exacerbée des prix sur lemarché des matières premières pose également sérieusement question.
Quels sont leschiffres de Liberty sur le risque politique et crédit ? Et qui sont voscourtiers ?
AlexandreEgnelle : Notre développement soutenu depuis 2010 permet audépartement crédit et risques politiques de peser autour de 6 % du CA total del’entreprise - 120 M€ en 2013, je vous le rappelle -, ce qui est un débutprometteur. Nous bénéficions, avec le reste du marché privé, d’un segmentporteur compte tenu de la conjoncture internationale et nous avons réussijusqu’à maintenant à maintenir un lossratio raisonnable. Quant à notre réseau d’apporteurs, il est très limité,car en dehors des départements dédiés des grands généralistes et de quelquesrares courtiers spécialisés, au premier rang desquels se trouve BPL, lecourtage en risque politique et crédit reste l’apanage d’un club restreint despécialistes. Miller France fait partie des nouveaux venus sur ce marché. Ducôté des porteurs de risque, plusieurs membres du Lloyd’s ont ouvert desdépartements risques politiques à mesure que le marché de la réassurance s’enfoncetoujours plus bas dans le cycle tarifaire.