Interview de la semaine

« Les récentes fusac créent des opportunités »

Publié le 18 février 2016 à 8h00

thierry gouby

Pierre-Olivier Desaulle, ‎DG France et Europe chez ‎Hiscox

thierry gouby
journaliste

Dans un marché en mouvement où les fusions-acqusitions se multiplient, Hiscox France garde son cap. Pierre-Olivier Desaulle, DG France et Europe, dresse le bilan de l'exercice passé et évoque les chantiers à venir pour l'assureur.

Comment s’est passée l’année 2015 pour Hiscox ?

En France, nous avons terminé 2015 à environ 80 M€ de primes, soit une croissance un peu moins rapide que les années précédentes, à presque 4 %. Cela s’explique essentiellement par notre sortie de l’activité d’accompagnement des diagnostiqueurs immobiliers au cours de l’année. Malgré les efforts et les moyens de formation mis en place sur ce métier depuis quelques années, c’est une profession pour laquelle la sinistralité a été particulièrement sévère.

Pour le reste de nos activités et sur nos produits phares, nous avons continué à nous développer avec une croissance à deux chiffres, conformément aux objectifs que nous nous sommes fixés. Les branches les plus volatiles restent les branches de responsabilité et les activités art et clientèle privée sont celles où les marges sont les plus étroites.

Que pèsent aujourd’hui les activités Europe et France pour le groupe Hiscox ?

Entre 20 et 25 % de l’activité du groupe est aujourd’hui portée par la réassurance. Ensuite, 25 % sont portés par le London Market et la moitié restante est réalisée par les activités d’assureur spécialiste que l’on pratique en Grande-Bretagne, en Europe et aux USA. Sur cette dernière partie, les activités européennes, et celles des USA, font la même taille, soit environ 220 M€ de primes annuelles.

La part de l’Europe reste modeste mais ambitieuse à l’échelle du groupe et il ne faut pas oublier que les marchés anglo-saxons sont beaucoup plus matures, notamment en termes de taux d’équipement, de pénétration et de primes.

Quelle est la répartition de votre portefeuille sur le marché français ?

Notre portefeuille est aujourd’hui constitué d’environ 60 % de clients professionnels et de 40 % de clients particuliers. Cette balance nous convient tant que les niveaux de croissance continuent d’évoluer rapidement.

Les entreprises de taille significative dans les métiers que nous visons (technologie de l’information, des médias, de la communication, du marketing ou de la publicité, ou encore les métiers du conseil, du recrutement ou des ressources humaines) sont souvent déjà couvertes avec un contrat qui intègre les risques liés à la RC pro. Le but est soit de les garder en portefeuille, soit de les faire venir chez nous.

Ensuite, plus la taille de l’entreprise va diminuer, plus la probabilité qu’elle ne soit pas assurée est grande. Notre objectif est alors de leur rendre nos solutions d'assurances professionnelles facilement accessibles, notamment via nos offres en ligne « Hiscox Direct ».

Quelles sont les ambitions d’Hiscox en Europe pour 2016 ?

Nous sommes dans la continuité de ces dernières années, c'est-à-dire une focalisation sur les deux gros marchés que sont la France et l’Allemagne. Ensuite, au Benelux et sur la péninsule Ibérique, nous allons également poursuivre nos efforts avec les ressources qui sont les nôtres. Nos axes de développement restent les mêmes, notamment sur le marché art et clientèle privée où les particuliers sont souvent mal équipés.

La difficulté aujourd’hui c’est que seuls 10 % de la clientèle privée couverte est consciente de son patrimoine et de ses niveaux de couverture. Il faut donc convaincre les 90 % restants, souvent mal ou peu assurés : c’est un marché de persévérance, impliquant un long travail d’évangélisation sur un marché ou les portefeuilles bougent très rarement.

Etes-vous intéressés par de nouvelles lignes de business ?

Sur nos business retail d’assureur spécialiste au niveau européen, nous sommes par exemple intéressés par tout ce qui concerne l’individuelle accident ou d’autres secteurs de responsabilité que ceux sur lesquels nous sommes positionnés aujourd’hui. Nous regardons aussi avec intérêt les problématiques de l’événementiel ou de l’annulation. Il y a donc des ouvertures possibles sur des activités qui sont adjacentes aux nôtres.

Nous nous sommes par exemple beaucoup développés sur les véhicules de collection dans un certain nombre de pays en Europe ces derniers temps et nous avons fait des acquisitions dans ce domaine en Angleterre. Nous sommes donc plutôt sur des sujets proches de nos activités traditionnelles, mais qui viennent se combiner à la fois à notre portefeuille de souscription et au type d’approche que nous mettons en œuvre avec notre réseau de distribution, notamment les courtiers.

Justement, quelles sont vos relations avec ces derniers ?

Ils nous apprécient car nous n’avons pas de réseau d’agents. C’est un avantage considérable car il n’y a pas de conflits de canaux. Lorsqu’ils ciblent une profession, les courtiers détestent que l’agent de la compagnie porteuse de risques, à travers ses activités de courtage, s’aligne ou fasse mieux qu’eux.

Lorsque nous nous sommes lancés sur le marché de la RC des agences de voyage et des tour-opérateurs, cela a été un élément clé pour pouvoir nous positionner. Idem pour les métiers de la sécurité. Le fait de ne pas être embourbé avec des réseaux traditionnels présente donc aussi des avantages.

Que vous inspire le marché actuel ?

Nous sommes dans une configuration classique de soft market, avec des surcapacités, une pression sur les prix, l’émergence de nouveaux entrants et des opérateurs qui interviennent sur de nouvelles lignes de business sur lesquelles ils n’ont aucun recul et où ils s’imaginent pouvoir faire des bénéfices.

Cela créé des phénomènes délirants en termes de positionnement tarifaire et d’agressivité commerciale, mais ce sont finalement des effets de cycles classiques. Ce sont des périodes déjà vues dans le passé. Il faut donc garder le cap, ne pas se laisser distraire par ce qu’il se passe autour, sans pour autant oublier de s’adapter, surtout lorsque l’on voit de nombreux mouvements de consolidation sur le marché de l’assurance et du courtage.

Que pensez-vous justement de toutes ces récentes fusions-acquisitions ?

Cela crée des opportunités. Lorsque vous ajoutez une capacité à une autre capacité, cela ne fait pas forcément une capacité double. Sur des risques syndiqués, cela signifie parfois qu’après une consolidation, les parts de syndication ne sont pas redistribuées de manière trop surpondérées entre les opérateurs.

Dans un certain nombre de cas, les rapprochements peuvent aussi traduire un manque de stratégie de la part d’acteurs qui cherchent à se renouveler ou à s’adosser à des plans déjà établis. Nous avons la modeste satisfaction de dire que notre stratégie fonctionne et que nous n’avons pas besoin d’aller chercher celle de quelqu’un d’autre.

Enfin, à la faveur de ces opérations, certains employés de ces entreprises peuvent être amenés à se manifester pour qu’on leur donne la possibilité de travailler plus sereinement. Nous sommes donc réceptifs à des profils ou des équipes légitimes et des compétentes sur certains segments de marché, que ce soit au Lloyd’s ou en France.

 

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