L’équipe de direction d’Humanis fait lepoint sur les sujets qui agitent l’assurance collective et revient surl’actualité de leur groupe.
Quel regard portez-vous sur lagénéralisation de la complémentaire santé à tous les salariés ?
Jean-Paul Lacam (J.-P.L.) : C’est une excellente nouvelle pour les assurésdu secteur privé qui seront les grands gagnants de cette généralisation. Nousfranchissons là une étape historique dans la protection sociale complémentairemaladie des Français. Il s’agit aussi d’une révolution pour le marché et, commetoute transformation, elle génère des inquiétudes, car tous les acteurs vontdevoir revoir leurs modèles économiques pour y faire face. C'est aussi uneoccasion unique pour accélérer la révolution des services et pour progresser versune maîtrise partagée des risques avec toutes les parties prenantes.
Quelle lecture faites-vous de ladécision du Conseil constitutionnel sur les clauses de désignation ?
Jean-Pierre Menanteau (J.-P.M.) : J'ai noté avec attention que le Conseil constitutionnelconsidérait que négociations par branche et mutualisation des risques formaientle cœur d'un objectif d'intérêt général et qu'il n'avait pas d'observation surune durée quinquennale. J'ai aussi observé qu'il s'était placé – selon unejurisprudence constante – sur le terrain de la proportionnalité s'agissant desindispensables restrictions à la liberté de choix des entreprisesconsubstantiels à l'objectif d'intérêt général. Il y a la matière à mettre enplace des solutions intelligentes pour combiner solidarité, émulationconcurrentielle et adaptation au juste besoin des entreprises. Je me suis mêmedit que l'articulation que nous prônons entre IP et mutuelles aurait peut-êtreencore plus de sens dans le nouvel accès au marché.
Doit-on s’attendre à un coup d’arrêtdans le développement des institutions de prévoyance ?
J.-P.M. : Les vuvuzelasmédiatiques sur ce thème me semblent plus relever de l'impulsivitéspectaculaire et de l'auto prophétie, qui sera démentie par les faits, qued'une analyse rigoureuse d'une décision du Conseil et des vrais atoutstechniques et métiers des groupes de protection sociale.
Justement, quels sont, selon vous, lesatouts des groupes de protection sociale ?
J.-P.L. : Les institutions de prévoyance ont démontré toutleur savoir-faire en assurance collective et dans la gestion des programmes debranche. La solidarité fait partie de leur ADN. Mais rien n’est jamais acquis :nous répondrons, comme les autres, aux appels d’offres. Je pense plus quejamais que la généralisation de la complémentaire santé, maternité et accidentdu travail à tous les salariés aura pour effet de renforcer l'intensité de laconcurrence et de modifier, à terme, la structuration industrielle du marché.Cette situation produira, j’en suis persuadé, un certain nombre d'effetsanalogues a l’instauration de la RC automobile obligatoire au début des années 1950 : révolution des services, intensité concurrentielle accrue, mais dans uneconfiguration de marché en BtoBtoC.
Une course dans laquelle les groupes deprotection sociale partent, semble-t-il, avec une longueur d’avance…
J.-P.L. : Il faut faire preuve d’humilité sur le sujet. Ladifférence dans le long terme se fera sur la maîtrise du risque et les servicesapportés aux entreprises et aux assurés. Nous nous sommes d’ailleurs engagésdans cette voie-là en passant un partenariat avec Itelis pour permettre à nosassurés d’accéder à un réseau de soins dont la qualité n’est plus à démontrer.Au-delà du niveau de service, nous avons souhaité gagner du temps ens’associant avec un réseau qui a fait ses preuves plutôt que de partir d’unefeuille blanche en constituant notre propre réseau. Je suis persuadé que ladifférence entre les acteurs se fera sur les services. J'espère que la batailleinitiale sur les prix ne sera pas déraisonnable pour la soutenabilité à moyenterme des modèles économiques.
Comprenez-vous les critiques desopticiens au sujet des réseaux de soins ?
J.-P.M. : En optique, nous essayons de faire progressermaîtrise des dépenses et qualité, en particulier sur le niveau de service délivréaux assurés. Dans ce cadre-là, les réseaux de soins sont une solution qui peutbénéficier à tous : les professionnels, les assurés comme les assureurs. Maisdans toute logique de transformation, il existe des freins légitimes auxchangements. C’est la raison pour laquelle nous dialoguons avec lesprofessionnels concernés pour trouver des solutions équitables et pérennes. Làencore, il est intéressant de faire le parallèle avec ce qui s’est passé il y aquelques années au sujet des garages agréés en auto. La constitution de cesréseaux a également connu quelques chamailleries initiales le temps que chacunse connaisse mieux et trouve les voies et moyens du partage de l'intelligencecollective. Plus personne ne doute aujourd’hui de leur efficacité d'ensemble.Bien sûr, la santé est un domaine beaucoup plus complexe que l'automobile.
Où en est la constitution du groupeHumanis ?
J.-P.M. : Elle avance chaque jour autour des valeursd'ambition, d'engagement et de partage. Je suis très admiratif de l'énergie deséquipes qui font face à des enjeux complexes. Les fusions sont des exercicesintenses techniquement, humainement et psychologiquement. Vous savez que legroupe est tout jeune. Beaucoup de chantiers ont déjà été menés à bien. Nousavons encore beaucoup de choses à faire, y compris combiner la fierté de nosracines et la projection résolue vers l'avenir.
Quels sont les prochains chantiers ?
J.-P.M. : Dans toute fusion, l'informatique, les processusfinanciers, les ressources humaines et les réseaux commerciaux sont des sujetsd'attention prioritaires. Je vous rappelle que nous sommes d'abord un acteurmajeur de la construction de l'usine-retraite. Notre objectif plus général estd'atteindre un très haut degré de fluidité opérationnelle de manière homogèned’ici à 18 mois. En attendant, Humanis n’est pas figé. La dynamique dudéveloppement se poursuit, comme en témoigne la sortie de "Radiance Humanis santé" qui porte les valeurs du groupe. Il s’agit du premier contrat né de lafusion, dont nous sommes très fiers car il est le fruit d’un travail commun.Pour résumer l’état d’esprit qui règne actuellement chez Humanis, je dirai quec’est "la fusion, toute la fusion, et du développement" dans tous nos métiersen France métropolitaine, en outre-mer et à l'international : retraite, santé,prévoyance, épargne et action sociale, notre cœur battant, là ou nous avonstoujours été encore plus qu'ailleurs des innovateurs au service du bien communet de l'aide individuelle.
Mais tout n’est pas idyllique… Le départde Mutuelle Humanis familiale n’a-t-il pas mis un frein à la dynamique que vousévoquez ?
J.-P.M. : Comme dans de nombreuses fusions, il existe despoints d’achoppements et des difficultés à résoudre. Il est normal derencontrer ici et là des difficultés. Le rapprochement d’entités différentesest parfois compliqué à gérer et long à se mettre en place. Le plus importantest que la construction avance et repose sur des bases solides. Concernant la mutuelleque vous évoquez, je prends acte du choix opéré en quelques semaines et durefus de déclencher un processus de médiation qui, à mon humble avis, aurait pupermettre de dépassionner les débats et de faire le tri entre les sujetscirconstanciels et le modèle d'association idoine de cette mutuelle. Cela étantdit, le processus de sortie de notre côté sera géré de manière professionnelle,sans aucun esprit de revanche, mais en gardant à l’esprit que demain, cettemutuelle sera en concurrence avec nous sur certains territoires.
Etes-vous aujourd’hui prêts à accueillird’autres mutuelles ?
J.-P.L. : Bien entendu ! Nous l’avons prouvé avec l’arrivéde la Mutuelle de l’industrie du pétrole qui a choisi de bâtir un partenariatstratégique avec nous au sein de notre pôle mutualiste. Et nous travaillonstoujours à accueillir de nouvelles mutuelles. Notre maison est ouverte auxpartenariats : ceux qui nous ont précédés en on fait une dimension trèsimportante d'Humanis. La capacité à associer des compétences est d’ailleursl’une des forces du groupe et pas uniquement avec les acteurs de la mutualité.Je vous rappelle que nous travaillons avec des partenaires stratégiques aussiimportants et variés qu’Apicil, Axa, CNP assurances, le Crédit agricole ouencore Thélem assurances. Nous sommes également très attachés à notrepartenariat avec l’Ocirp qui nous accompagne sur la dépendance. Lespartenariats font donc partie de l’ADN du groupe sur lequel nous nous appuyonspour construire le développement futur. C’est d’ailleurs un atout considérable,car il est évident que de nombreux rapprochements vont se nouer dans les annéesà venir autour de la poursuite de la transformation des chaînes de valeur. An’en pas douter, Humanis bénéficiera de sa capacité à fédérer et à associer descompétences diverses.