Marc Michoulier, directeur général adjoint, et StanislasChapron, président du directoire et CEO de Marsh France
Revue de détail, avecMarsh, des grandes tendances à l’œuvre sur le marché d’assurance des grandesentreprises.
Marsh France présentait, il y a peu, à ses principauxclients l’état du marché de l’assurance. Qu’en est-il ?
Marc Michoulier (M.M.) : Le contexte global estinchangé depuis 2012. Le différentiel de croissance entre la France et l’internationalcontinue de pousser nos clients français à développer leurs activités hors de nosfrontières. De fait, la présentation sur l’état du marché de la réassurance,menée avec nos collègues de Guy Carpenter, a beaucoup intéressé de par sacomposante internationale. L’afflux de capacités sur ce marché et la bonnetenue de la sinistralité catastrophique font pression sur les tarifs deréassurance. Nos clients "grandes entreprises" nous interpellentnotamment sur la façon dont ils pourraient bénéficier des capacitésalternatives disponibles sur le marché de la réassurance.
Que leur répondez-vous ?
Stanislas Chapron (S.C.) : Actuellement, cetafflux de capacités bénéficie essentiellement aux cédantes, les gros acheteursde protection de réassurance ; par ricochet, il y a des bénéfices relatifsà attendre pour les entreprises clientes en termes de tarifs. Mais, pourl’heure, le direct n’est concerné qu’à la marge. Je note toutefois que les tauxd’intérêts restent bas et l’appétit des investisseurs ne se dément pas pour laréassurance. Les catbonds, supportsprivilégiés de ces investisseurs, descendent en volume moyen et se portent surdes risques plus circonscrits, voire directs, et non plus mutualisés par unassureur ou un réassureur. Ainsi, le risque inondation du métro new-yorkais estdésormais couvert dans le cadre d’un catbondde 50 M$.
Cette internationalisation à marche forcée del’économie française fait-elle évoluer les risques majeurs qui pèsent sur lesentreprises ?
M.M. : Oui, très clairement. Le risque politiquemonte en puissance dès lors que vous évoluez sur de nouveaux marchés. D’autantplus que, ces dernières années, les tensions géopolitiques se sont exacerbéesdans de nombreuses régions du globe, le risque crédit et les défaillancesd’entreprises sont en augmentation. En dépit de ce contexte délicat, lescapacités sont à la hausse avec l’arrivée de nouveaux acteurs et les prixrestent ainsi globalement stables. La recommandation de Marsh est de saisircette opportunité de marché pour protéger l’existant et tenter de se garantirsur le long terme pour se prémunir d’une dégradation potentielle del’environnement international et d’un possible retournement de marché.
S.C. : Dans la même veine, le marché de lacaution est à surveiller de près par les risk managers pour leurs opérations deconstruction, leurs projets immobiliers, l’environnement, le transport et lecommerce à l’export. Compte tenu du marché tendu de la caution bancaire enEurope, des solutions concurrentielles se font jour avec les assureurs.
Quelles sont les autres grandes tendances du marché ?
M.M. : La pression réglementaire, la croissanceatone des pays développés et la quasi-absence de revenus des placementsfinanciers forment un cocktail assez indigeste pour les assureurs directs desgrandes entreprises. Ils doivent encore et toujours améliorer la conformité deleur process et rechercher des parts de marché à l’international.
S.C. : Par ailleurs, le risque cyber est unepréoccupation majeure des entreprises. Pour y répondre, les assureurs ont faitde gros efforts et l'on est passé d’une capacité disponible pour 2012 de 50 M€avec seulement quatre porteurs du risque cyber, à une capacité disponible pour2014 de 250 M€ avec une dizaine d’assureurs sur le marché. Aux Etats-Unis, lemarché représente d’ores et déjà un volume de primes de 1,5 Md$ ; ce n’estpas encore le cas en Europe mais, à l’instar de ce qui s’est passé avec la RCdes dirigeants, le marché des risques cyber va progressivement prendre toute sadimension dans le paysage assurantiel européen. Cette capacité de transférer aumarché d’assurance les risques cyber conforte le rôle du risk manager dansl’entreprise, aux côtés des DSI.
Outre le risque cyber, y a-t-il d'autres risques émergents pour les entreprises ?
S.C. : Un autre sujet majeur de la gestion des risques dumarché français concerne les risques environnementaux, avec des évolutionsréglementaires notables tant à l’international qu’au niveau européen oufrançais et le projet d’inscrire la notion de préjudice écologique dans le Codecivil. La tendance est claire : elle est à l’élargissement desresponsabilités en cas d’atteinte à la biodiversité. Dans un contexte de fortescapacités d’assurances et de pression tarifaire, Marsh recommande notamment àses clients de souscrire des garanties pluriannuelles.
Qu’anticipez-vous sur les principales lignes desassurances de l’entreprise ?
S.C. : En termes de capacités, le maître mot dela campagne 2014 est à la stabilité, voire à l’excédent de capacités. Seulesexceptions, les RC Pro et dirigeants des banques et institutions financières. Ence qui concerne les tarifs, Marsh constate là aussi à fin 2013 une grandestabilité des niveaux de primes. Mais là encore, les banques et institutionsfinancières pourraient subir des hausses tarifaires. Enfin, on note toutefoisdes pressions à la hausse sur les lignes flottes automobiles et employee benefits des grandesentreprises industrielles et commerciales.