Aulendemain du colloque de l’Association actuarielle internationale qui s’esttenu à Lyon, Christophe Eberlé, président d’Optimind Winter, revient sur les perspectivesoffertes à la profession d’actuaire et fait le point sur ses activités.
En tant qu’actuaire conseil, quepensez-vous du projet de loi Hamon sur la résiliation à tout moment ?
Elleest à l’image de la société où l’on se sépare de tout, tout de suite. Maiscette loi pose problème, car elle va à l’encontre du modèle de l’assurance etde son unité de temps. Je crois qu’il ne faut pas confondre l’assurance avec latéléphonie mobile par exemple. Le contrat d’assurance a besoin d’une certainestabilité. Il est illusoire de penser que les assureurs pourront mutualiser lesrisques sur des périodes inférieures à un an. L’entée en vigueur de larésiliation à tout moment pourrait donc toucher de manière significative lafaçon de tarifer les risques et de mutualiser les portefeuilles sans forcémentaméliorer le service au consommateur.
Quel regard portez-vous sur le phénomène big data ?
Ils’agit d’une lame de fond passionnante que je suis très attentivement à titrepersonnel, mais aussi en qualité de vice-président de l’Institut des actuaires.Car, à l’instar de nombreux secteurs d’activités, ce phénomène est loin d’êtreneutre pour l’industrie de l’assurance. Je suis convaincu que le big data, et donc l’exploitation d’unemultitude de données issues de sources diverses non structurées, varévolutionner le métier d’actuaire.
Et ne craignez-vous pas une concurrence des data scientists ?
Non, pourla simple et bonne raison que la principale force des data scientists consisteprincipalement à travailler sur des volumes extrêmement importants de donnéesnon structurées. Or, la mission de l’actuaire repose sur l’exploitation desdonnées structurées et complexes avec comme objectif principal de veiller auxéquilibres techniques. Actuaires et data scientists ne sont donc pasconcurrents, mais parfaitement complémentaires ! Je rassure les plussceptiques, l’actuaire a encore de l’avenir, d’autant plus dans unenvironnement big data
C'est-à-dire ? Quelles sont lespossibilités offertes par le big data pour les actuaires ?
Lephénomène ouvre de nombreuses perspectives dans la façon de tarifer lesrisques. Cela donne aux actuaires l’opportunité d’affiner les modèles et desophistiquer les approches d’étude des risques. Mais il faut faire preuved’humilité. Les actuaires n’ont pas encore pris la pleine mesure du phénomène,qui est assez récent. Raison pour laquelle le big data fait partie des sujets que l’Institut des actuaires suitde près.
Justement, l’Institut des actuaires arécemment réuni ses membres. Que retenez-vous du congrès ?
Lecongrès, dont le fil rouge était l’innovation et la gestion des risques auservice d’une performance pérenne, a été très riche. La manifestation a étéponctuée par l’intervention du député Karine Berger qui a réaffirmé le rôleincontournable des actuaires dans la compréhension de la gestion des risques.En termes d’innovation, je rappelle que Karine Berger est co-auteur du rapportsur l’épargne financière qui démontre l’utilité de lancer un produit "eurocroissance". Sur ce sujet, nous notons d’ailleurs un certain intérêt dumarché dans la mesure où nous sommes sollicités pour mener des missions deconseil auprès de plusieurs acteurs de la place qui étudient très sérieusementl’opportunité de commercialiser d’ici peu ce type d’offre.
Quel bilan faites-vous, un an après, durapprochement entre Optimind et Winter ?
Lerapprochement des deux structures est maintenant terminé. Nous avons une marqueunique, "Optimind Winter", animée par 180 collaborateurs quiadhèrent au projet d’entreprise "OW 3.0". Notre priorité a été demettre en œuvre une gouvernance commune, de limiter les niveaux hiérarchiqueset les départements, et de nous positionner en tant que mutlispécialistes afinde servir au mieux nos clients. Raison pour laquelle nous avons défini 16 pôlesde compétences (Orsa, épargne, Solvabilité II…), composés de 10 à 15 actuairesplacés sous la responsabilité des practiceleaders. Nous avons également œuvré à mettre en place un maximum desynergies pour profiter de toutes les compétences. Bref, après presque un an detravail intensif, je salue la capacité et le talent de mes collaborateurs pouravoir réussi le pari de construire une entreprise performante, pérenne etexperte au service d’organismes assureurs également confrontés à de nouveauxdéfis.
Quels sont les premiers résultats de cerapprochement ?
Grâceau travail d’équipe, nous avons réalisé l’année dernière un chiffre d’affairesconsolidé de 28 M€, ce qui fait d’Optimind Winter le leader incontesté dumarché de l’actuariat conseil. Fort de cette position, nous visons unecroissance de 8 % pour l’exercice courant. Le prochain défi consistera à nousdévelopper hors de nos frontières avec l’aide d’Euracs, notre réseau partenaireinternational, tout en envisageant des acquisitions en Europe.