Jean-Jacques Branche, président de l’EPA
Pour asseoir sa stratégie de développement dans le domaine de la formation, l’Ecole polytechnique d’assurances (EPA) se réorganise autour de deux structures, l’une dédiée à la formation continue de courte durée, et l’autre à la formation longue diplômante, en s’adossant à Télécom ParisTech. Son déménagement au premier semestre 2016 dans les locaux de cette école s’inscrit dans ce cadre.
Comment se positionne l’EPA dans l’univers de la formation à l’assurance ?
L’Ecole polytechnique d’assurances (EPA) a fêté en 2015 ses 90 ans et a participé en 1930 à la rédaction du premier Code des assurances. Elle est née sous la forme d’une section de l’Association polytechnique et a toujours développé des valeurs humanistes. Devenue association indépendante en 1992, c’est maintenant via une autre structure dont le nom sera divulgué prochainement que seront diffusées les formations continues qualifiantes dans le secteur de l’assurance, essentiellement en intra mais aussi en inter au travers de master class. L’EPA était très proche de l’Ecole supérieure d’assurances (ESA) qui, elle, dispense des formations diplômantes dans le secteur de l’assurance. Le non-renouvellement des accords qui nous liaient à l’ESA jusqu’au 31 décembre 2015 nous a conduit à revoir notre stratégie et à nous rapprocher d’une grande école : Télécom/ParisTech/les Mines. En septembre dernier, nous avons signé avec cette dernière un partenariat dans la perspective de créer un EMBA « data scientist des métiers de l’assurance ». Mais avant cela, nous avons constitué le comité scientifique de l’EPA avec quatre sous-commissions : technique, stratégique, éthique et management.
Quelle est la composition de ce comité scientifique ?
Ce comité scientifique, à parité et dont le président d’honneur est Luc Ferry, compte aujourd’hui 33 membres issus de compagnies d’assurance, de bancassureurs, de mutuelles, du courtage, et d’institutions de prévoyance. Parmi eux figurent des directeurs généraux et opérationnels, mais aussi des enseignants, des chercheurs, des data scientists, etc. Tous sont animés par la même passion et partagent des valeurs communes. Depuis sa première réunion qui s’est tenue en février 2015, ce comité scientifique a travaillé de façon collaborative. Sa première réalisation est le livre blanc intitulé L’humain dans le numérique et le big data. Ses auteurs au travers d’articles font partager leur vision sur les enjeux que représente le numérique et le big data pour le secteur de l’assurance.
Quelles sont justement ces enjeux ?
Nous sommes entrés dans la première phase de la transformation digitale et nous sommes à l’aube d’un changement de paradigme. Les acteurs de l‘assurance se posent beaucoup de questions. Quelles opportunités apporteront le numérique et le big data ? Quels dangers représentent-ils ? Comment maintenir l’homme au centre de ce nouveau monde ? S’ils sont utilisés de façon responsable, le numérique et le big data peuvent être mis au service du bien et de l’humain. En revanche, dans un contexte de guerre économique, s’ils sont utilisés sans éthique, ils peuvent asservir les entreprises et permettre de contrôler et manipuler les individus, notamment à partir des données récoltées. Les auteurs du livre blanc abordent tous ces points en mêlant des considérations de nature technique à des réflexions d’ordre stratégique, éthique et managérial. Ces quatre axes, technique, stratégique, éthique et managérial, représentent d’ailleurs les quatre piliers autour desquels a été bâti l’executive EMBA « data scientist des métiers de l’assurance ».
A qui s’adresse ce diplôme et quelles sont les conditions d’entrée ?
Cet EMBA vise tous les professionnels de l’assurance et de la bancassurance qui ont un niveau de formation bac + 5 statistiques, mathématiques, informatique ou bac + 4 avec trois ans d’expérience. Peu d’assureurs disposent aujourd’hui d’expertises à la fois ingénieur et métier. Un maximum de 30 personnes pourront le suivre dès cette année. La sélection s’effectuera à partir du mois de mars sur dossier puis entretien. Avant de démarrer le programme, les candidats retenus passeront un test de personnalité réalisé par un coach certifié et bénéficieront d’une remise à niveau en data science et mathématiques, via un Massive open on line course (Mooc) de vingt-quatre heures et d’une remise à niveau en anglais si nécessaire.
Quelle est la durée de la formation et comment s’articule le programme ?
Cet EMBA, qui est déjà soutenu par BNP Paribas Cardif, prévoit 470 heures de formation étalées sur treize mois, à raison d’une semaine par mois. Le programme comporte quatre modules : technique (data sciences, principes de l’assurance et technique actuarielle), stratégique, managérial, et éthique ainsi qu'un cours d’histoire et de philosophie. Trois jours sont consacrés aux données personnelles et à la conformité client.
Qui délivre l’enseignement et quelles sont les méthodes pédagogiques utilisées ?
Cet EMBA a été coconstruit en s’appuyant sur l’expertise internationale de Télécom ParisTech mais aussi avec d’autres établissements : l’Institut de science financière et d’assurances (ISFA) avec le soutien de l’Institut des actuaires et l’Institut d’intelligence économique. La partie data science est dispensée par les professeurs de Télécom ParisTech, la partie technique par l’ISFA, la partie stratégique par l’Institut d’intelligence économique et les parties management et éthique par l’EPA. Les apprenants travaillent sur des études de cas pratiques, notamment sur la tarification, la distribution, le marketing. Ils doivent rédiger un mémoire et le soutenir. Tout au long de la formation, ils ont à rédiger des notes de synthèse et à répondre à des QCM. En milieu de programme, il est prévu trois jours d’experience learning via des serious games, une méthode d’apprentissage originale testée avec succès à l’Otan. La partie data sciences de l'EMBA donnera également lieu à la délivrance par Télécom ParisTech d’un certificat d’études spécialisé (CES).
Quel est le coût de cette formation et qui la finance ?
La formation à cet EMBA représente un budget de 24 K€ et peut être financée par l’entreprise sur son plan de formation. Cela représente un gros investissement mais les assureurs, conscients des enjeux du big data et du numérique, sont prêts à les relever pour faire face aux Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon).
Après cet EMBA cobrandé EPA/Télécom ParisTech, sur le numérique et le big data, envisagez-vous de lancer d’autres formations initiales ou continues ?
Absolument. Nous avons prévu en 2017 de lancer un nouveau diplôme en marketing stratégique digital adapté à l’assurance et un autre lié à l’économie sociale et solidaire. Toujours en associant les connaissances métier de l’EPA et les compétences scientifiques transverses de Télécom ParisTech. D’autres sujets sont à l’étude, tels que l’organisation des systèmes d’information ou encore la cyber sécurité. Mais pour l’heure, notre première préoccupation est de réussir le lancement de l’EMBA « data scientist des métiers de l’assurance ». J’ajouterai que les assureurs et bancassureurs qui le souhaitent peuvent sponsoriser notre initiative et participer au comité scientifique. Nous sommes d’ailleurs actuellement en cours de discussion avec plusieurs partenaires.